Discrimination raciale dans l'offre d'un logement (fr)

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
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Auteur : Thierry Vallat, avocat au barreau de Paris
Mai 2019




Un rapport de SOS racisme, qui a mené pendant un an une vaste opération de testing dans la région parisienne révèle qu'une personne perçue comme ayant une origine étrangère part avec moins de chances qu'une personne perçue comme "d'origine française ancienne" pour louer un logement en Île de France.


Rappelons que pour sélectionner un locataire parmi les candidats, le propriétaire a le droit de se fonder sur des critères objectifs ayant trait à sa situation financière comme :


  • Le revenu
  • La présence ou non d'une personne se pourtant caution,
  • La situation professionnelle (CDI, CDD) etc ..


Certains critères ne doivent jamais être retenus pour choisir un locataire, car discriminatoires :


  • Origine géographique, nom de famille, lieu de résidence
  • Appartenance ou non-appartenance, réelle ou supposée, à une ethnie ou à une nation
  • Langue parlée (autre que le français),
  • Sexe ou identité de genre
  • Situation de famille, grossesse ou maternité
  • Orientation sexuelle ou mœurs
  • Apparence physique,
  • Âge
  • État de santé, handicap, perte d'autonomie
  • Caractéristiques génétiques
  • Religion, convictions politiques ou activités syndicales
  • Précarité de sa situation économique.


Si vous avez demandé un logement dans le parc privé et que estimez avoir été victime d'une discrimination à la location, vous pouvez exercer différents recours.


Vous pouvez porter plainte dans un délai de 6 ans après les faits contre Le propriétaire et éventuellement, l'agent immobilier, s'il a sélectionné des candidats selon des critères discriminatoires.


Vous devez prouver que votre non-sélection s'est faite uniquement en raison de critères discriminatoires. Sans attendre l'enquête de la police ou de la gendarmerie, vous pouvez recueillir toute forme de preuve : témoignages, courriers...


La pratique du testing, lorsque une personne se fait passer pour un candidat locataire pour vérifier qu'elle sera bien discriminée, peut être admise comme preuve par la justice.


L'auteur d'une discrimination, (propriétaire, agent immobilier) encourt une peine pouvant aller jusqu'à :


  • 3 ans de prison,
  • et 45 000 € d'amende (article 225-2 du code pénal)


Vous pouvez également saisir le Défenseur des droits, ce qui peut aboutir à 3 solutions :


  • Une médiation : désigné par le Défenseur des droits, le médiateur entend les personnes concernées. La médiation ne peut excéder 3 mois renouvelable 1 fois
  • Une transaction : le Défenseur des droits propose à l'auteur des faits une ou plusieurs sanctions (versement d'une amende, indemnisation de la victime, publicité des faits). En cas d'accord, la transaction doit être validée par le procureur de la République
  • Une action en justice :


Les victimes ont rarement conscience d’avoir fait l’objet d’une discrimination raciale. Les preuves manquent et le testing sera bien souvent la seule manière de pouvoir démontrer la discrimination.


C'est ce qui avait permis le 26 juin 2003 au TGI de Toulouse de condamner un propriétaire et son agence à 3.000 euros chacun pour discrimination dans l'offre ou la fourniture d'un bien ou d'un service en raison de l'origine, de l'ethnie ou de la nationalité. Un bailleur avait chargé une agence immobilière de rechercher des locataires et cette dernière, piégée par un enregistrement, avait avoué ne pas pouvoir proposer cet appartement " à de gens de couleur ".


La Chambre criminelle de la cour de Cassation, dans un arrêt du 7 juin 2005 (n°04-87.354) [1] avait confirmé cette condamnation.


Et cette discrimination ne touche pas que le parc privé, mais aussi les logements HLM.


En mars 2016, Logirep, l'un des plus gros bailleurs sociaux d’Île-de-France a été condamné par la Cour d'appel de Versailles pour «fichage ethnique» de ses locataires et discrimination raciale à l'encontre d'un candidat qui s'était vu refuser un appartement au motif qu'il était noir.


La Cour avait condamné Logirep à 25.000 euros d'amende pour discrimination.


Me Thierry Vallat a été interrogé par LCI sur ce sujet et vos recours Logement : vous pensez être victime de discrimination. [2]