Action en contrefaçon (fr)
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France > Propriété intellectuelle > Droit d'auteur
La contrefaçon constitue un véritable fléau qui a gagné tous les secteurs économiques. Toute chose créée peut être contrefaite et constituer un préjudice pour son propriétaire. En effet, des marques aux produits alimentaires, en passant par les médicaments ou les pièces de voitures, les contrefacteurs n’oublient rien. Ainsi, la propriété intellectuelle ne fait pas exception et se trouve également menacé par des actes de contrefaçon en constante augmentation. C’est cette dernière, analysée à la lumière de la récente loi du 29 octobre 2007 sur la lutte contre la contrefaçon[1], qui nous intéresse ici tout particulièrement.
La définition de la contrefaçon
La contrefaçon est définie et réprimée aux articles L335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Il est important d’éviter toute confusion entre les différentes contrefaçons établies à ces articles et les actes de concurrence déloyale.
La distinction entre contrefaçon et concurrence déloyale
En pratique, l’action en concurrence déloyale est souvent invoquée comme auxiliaire de la protection de l’action en contrefaçon. Mais il s’agit bien de deux actions distinctes à ne pas confondre. L’action en contrefaçon et l’action en concurrence déloyale n’ont en effet ni le même objet ni la même cause. La vocation de l’action en contrefaçon est de sanctionner l’atteinte portée à un droit privatif, tandis que l’action en concurrence déloyale vise la sanction à un manquement à la déontologie commerciale, élément distinct de l’atteinte portée à un droit de propriété intellectuelle. Néanmoins, les faits constitutifs de contrefaçon sont souvent accompagnés d’agissements qui causent un préjudice commercial, d’où le cumul possible des deux actions dès lors qu’elles reposent sur des faits distincts.
Les différentes contrefaçons
En raison de la diversité des secteurs concernés par la propriété intellectuelle (domaine que nous abordons de manière exclusive ici), l’action en contrefaçon a vocation à régir de nombreux litiges. En effet, chaque droit intellectuel visé par le Code de la propriété intellectuelle prévoit l’action en contrefaçon comme moyen de défense des prérogatives reconnues. Ainsi, le titulaire des droits sur une marque, sur un brevet d’invention, sur un dessin ou modèle ou encore de droit d'auteur est recevable à agir sur le terrain de la contrefaçon.
Les différents actes de contrefaçon
La contrefaçon en matière de propriété intellectuelle se définit comme l’atteinte portée au monopole conféré par les différents droits privatifs. Elle est ainsi caractérisée, indépendamment de toute mauvaise foi ou faute, par la reproduction, la représentation ou l’exploitation d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de propriété intellectuelle qui y sont attachés. L’article L335-2 du Code de la propriété intellectuelle indique que « Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon ; et toute contrefaçon est un délit […] ». L’article L. 335-3 du même Code poursuit en précisant que « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits d’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi. […] ». En pratique, les actes de contrefaçon sont alors divers et variés. Cela peut aller de la fabrication à la vente, en passant par l’utilisation de produits contrefaits. Les droits patrimoniaux ne sont pas les seuls à pouvoir faire l’objet d’acte de contrefaçon. Une action en contrefaçon pour atteinte aux droits moraux, notamment au droit à la paternité, est ainsi possible dès lors que la victime est en possession de preuves de sa qualité d’auteur de l’œuvre contrefaite. Si ces actes sont le plus souvent le fruit de celui qui reproduit ou représente sans droit, sans autorisation, ils peuvent également être le fait du cessionnaire des droits dès lors qu’il dépasse les limites de la cession qui lui a été consentie.
Les conditions de l’action en contrefaçon
La constatation de la contrefaçon
Il s’agit ici de rapporter la preuve de l’existence d’une contrefaçon. Le demandeur de l’action en contrefaçon est libre de rapporter n’importe quel type de preuve pour établir la contrefaçon. Cette liberté de la preuve, destinée à assurer une protection maximale aux ayants-droit, est d’autant plus appréciée depuis la dématérialisation des œuvres. En effet, si la saisie-contrefaçon reste le mode de preuve le plus efficace, cette méthode se retrouve parfois confrontée à l’absence d’objet matériel mis en cause. Il en est de même pour les retenues en douanes. Ces deux procédés se sont néanmoins vus renforcé par la loi du 29 octobre 2007 sur la lutte contre la contrefaçon. Toujours en vue de renforcer la protection des titulaires de droits de propriété intellectuelle, ladite loi supprime la référence à la contrefaçon d’ « échelle commerciale » présente dans la directive. Cela permet d’incriminer les téléchargeurs individuels qui, autrement, auraient pu se prévaloir d’une limitation de la contrefaçon au cas de la recherche d’un « avantage économique et commercial direct ».
La qualité à agir
La titularité des droits privatifs est la pierre angulaire de l’action en contrefaçon car elle en explique sa double finalité. Cette action poursuit deux objectifs : préserver le droit privatif de propriété intellectuel et réparer le préjudice causé par l’atteinte à un tel droit. La recevabilité de l’action est donc subordonnée à la titularité d’un droit de propriété intellectuelle. C’est à celui qui invoque une contrefaçon de son brevet, sa marque ou son œuvre, de prouver qu’il est titulaire des droits d’auteur ou d’un droit de propriété industrielle sur l’objet en cause. L’accomplissement des formalités nécessaires à l’octroi du titre en matière industrielle facilitent le rapport d’une telle preuve. En revanche, en matière de droit d’auteur, il appartiendra à la victime d’établir l’originalité de sa création afin de revendiquer les prérogatives qui en découlent. Ainsi, si l’auteur peut avoir la qualité à agir au titre de la contrefaçon pour les droits moraux et les droits patrimoniaux qu’il aurait conservé, il en va de même du promoteur d’une œuvre collective, de l’employeur de l’auteur d’un logiciel, du cessionnaire des droits patrimoniaux, ou encore du titulaire d’une licence en matière de modèles depuis la loi du 29 octobre 2007.
Les modalités de l’action en contrefaçon
Les mesures préalables
Avant d’exercer l’action en contrefaçon au fond, la victime peut faire ordonner différentes mesures destinées à prévenir une atteinte imminente ou empêcher la poursuite d’acte argués de contrefaçon[2]. L’un des objectifs de la dernière loi sur la contrefaçon est précisément de renforcer ces procédures simplifiées et accélérées de saisine du juge civil. Ainsi, il est notamment possible d’interdire purement et simplement la poursuite des actes de contrefaçon, de subordonner la poursuite de l’activité arguée de contrefaçon à la constitution de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du demandeur, ou encore de prononcer une saisie conservatoire. Ces mesures préalables n’ont pas pour objet de se substituer à l’action au fond, qui devra intervenir dans un délai déterminé par la loi.
Le lieu
Les règles relatives à la compétence territoriale sont celles du droit commun. Ainsi, le demandeur peut assigner le défendeur devant le tribunal du domicile de ce dernier ou celui du lieu du fait dommageable ou encore celui du lieu où le dommage a été subi. En ce qui concerne la compétence d’attribution en matière de propriété littéraire et artistique, la loi du 29 octobre 2007[3] a eu pour effet d’apporter une plus grande clarté et stabilité dans les demandes portées devant les juridictions de l’ordre judiciaire. Désormais, à l’instar des modèles, le contentieux relève de certains tribunaux de grande instance déterminés par voie réglementaire et non de tribunaux de commerce[4].
L’option entre l’action pénale et l’action civile
L’article L331-1 modifié du Code de la propriété intellectuelle dispose que « Toutes les contestations relatives à l’application des dispositions de la première partie du présent code qui relèvent des juridictions de l’ordre judiciaire sont portées devant les tribunaux compétents, sans préjudice du droit pour la partie lésée de se pourvoir devant la juridiction répressive dans les termes du droit commun[…] ». L’action en contrefaçon devant une juridiction civile se prescrit selon les délais de droit commun prévus à l’article 2270-1 du Code civil, soit 10 ans à compter de la date de la révélation du délit. Il peut donc être plus intéressant d’exercer l’action indemnitaire devant une juridiction civile plutôt que devant une juridiction répressive car dans le dernier cas le délai de prescription est de 3 ans à compter de la commission de l’acte. À noter en revanche que les actions en défense des droits moraux sont imprescriptibles.
Voir aussi
- Trouver la notion "Action en contrefaçon" dans l'internet juridique français
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Notes et références
- ↑ Loi n°2007-1544 du 29 octobre 2007 relative à la lutte contre la contrefaçon, JORF n°252 du 30 octobre 2007 page 17775, transposant la Directive communautaire n°2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle
- ↑ Cf art. 9 de la Directive communautaire n°2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle
- ↑ Loi n°2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon
- ↑ Article L331-1 modifié du CPI