Calcul du TEG et assurance décès invalidité : informe-toi pour mieux informer

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
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Par Louis Thibierge
Agrégé des Facultés de Droit
Professeur à l’Université d’Aix-Marseille
Membre du Centre de Droit Économique
Directeur du Master 2 Recherche Droit Économique
Directeur du DESU Economic Law
Avocat au Barreau de Paris

Il appartient à la banque de se renseigner auprès de l’emprunteur sur le coût de l’assurance décès invalidité obligatoire pour déterminer le TEG.

Voici l’enseignement tiré d’un arrêt rendu il y a deux jours (Cass. civ. 1re, 7 septembre 2022, n° 21-16646) par la Cour de cassation.

Au cas d’espèce, une banque consent en 2009 à une SCI un crédit immobilier sur 20 ans, au TEG de 4,70 % l’an.

Arguant de différentes irrégularités du contrat de prêt, l’emprunteur fait assigner la banque aux fins de voir substituer le taux légal au taux conventionnel et de lui rembourser les sommes indument perçus au titre du taux conventionnel.

En effet, l’emprunteur estimait le TEG erroné, car ne prenant pas en compte le coût de l’assurance décès invalidité obligatoire. Le taux réel n’était pas de 4,70 % mais de 4,9975 % l’an.

Or, le droit applicable à date (l’ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet n’était pas en vigueur), le prêteur qui avait commis une erreur supérieure à la décimale dans l’indication du TEG était déchu de son droit à intérêts.

La cour d’appel (Dijon, 11 févr. 2021, n° 18/01578) repousse contre toute attente la demande. Par-delà l’inexactitude matérielle du calcul du TEG, la cour d’appel raisonne en termes d’imputabilité.

Ainsi, les juges bourguignons affirment qu’il « il ne saurait être reproché à la Caisse d’épargne de ne pas avoir intégré dans le calcul du TEG le coût de l’assurance […] alors que la SCI Mermoz ne rapporte pas la preuve, qu’à la date de l’édition de l’offre de prêt le 9 juin 2009, la banque avait connaissance du montant de la cotisation d’assurance invalidité décès, alors que celle-ci produit l’attestation d’assurance de prêt établie le 12 juin 2009 par GMPA et un courrier adressé le 16 juin 2009 à la banque par l’assureur, qui ne donnent aucune précision sur le montant des primes d’assurance, de sorte que le coût de l’assurance ne pouvait être indiqué avec précision antérieurement à la signature du contrat ».

Autrement dit, la faute n’était pas imputable à la banque, qui n’avait pas connaissance du coût de l’assurance lors de l’émission de son offre de prêt.

Le raisonnement peut sembler spécieux : comment opérer un calcul du TEG lorsqu’on ignore une ses composantes ? La cour d’appel surmonte l’obstacle en relevant que l’offre indiquait explicitement que le montant de la prime d’assurance n’entrait pas dans le calcul du TEG. La parade semble tout aussi spécieuse : qu’est-ce qu’un taux effectif GLOBAL qui ne prend pas en compte la globalité des coûts ?

Sans surprise, la Cour de cassation censure les juges du fond. Leur est reproché un manque de base légale, faute d’avoir recherché « si la banque s'était s'informée auprès du souscripteur du coût de l'assurance avant de procéder à la détermination du taux effectif global dans le champ duquel un tel coût entrait impérativement ».

Dont acte : pour informer loyalement l’emprunteur, il appartient au prêteur de s’informer. Faute de quoi l’information n’est que miroir aux alouettes.