De la distinction entre le manquement au devoir pré-contractuel d’information (art. 1112-1 C. Civ.) et les vices du consentement

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.
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Par Louis Thibierge
Agrégé des Facultés de Droit
Professeur à l’Université d’Aix-Marseille
Membre du Centre de Droit Économique
Directeur du Master 2 Recherche Droit Économique
Directeur du DESU Economic Law
Avocat au Barreau de Paris



Un récent arrêt (Versailles, 6 janvier 2022, n° 20/00380) offre l’occasion d’un salutaire rappel de la dichotomie manquement au devoir d’information / vices du consentement.

Au cas d’espèce, une promesse de vente est conclue. Entrant dans les lieux avant la levée de l’option (grâce à une convention d’occupation précaire), le bénéficiaire découvre d’importants désordres (tuiles poreuses, chaufferie non-conforme).

Il renonce à acheter la maison, refuse de signer l’acte authentique et sollicite la restitution de l’indemnité d’immobilisation.

Le TGI de Versailles (3 décembre 2019) prononce la nullité de la promesse de vente en raison du manquement du vendeur à son devoir d’information (art. 1112-1 C. Civ.).

La cour d’appel de Versailles réforme la décision à deux titres.

D’une part, et l’on glissera sur ce sujet, la cour retient que le manquement au devoir d’information n’est pas caractérisé, tant parce que les promettants ignoraient les vices allégués que parce que le bénéficiaire avait visité trois fois la maison avant de conclure et ne pouvait ignorer certains désordres visibles.

D’autre part, et c’est à ce titre que l’arrêt suscite l’intérêt, la cour rétablit l’orthodoxie, affirmant que le juge « ne peut prononcer la nullité d’une promesse de vente au seul constat d’un manquement à l’obligation d’information, celui-ci n’étant pas sanctionné à lui seul par l’annulation du contrat ».

De fait : la sanction de l’article 1112-1 tient exclusivement dans les dommages-intérêts. Pour pouvoir entraîner la nullité du contrat, il faut que le manquement soit à l’origine d’un vice du consentement (erreur sur une qualité essentielle, dol, violence). Ce que les demandeurs n’avaient ni allégué, ni démontré.

A retenir : introduire sa demande sur le seul fondement de l’article 1112-1 C. Civ., c’est se priver de la possibilité de demander la nullité de la convention litigieuse.