Entrée en application du Règlement européen du 25 juin 2019, dit Bruxelles 2 ter
Droit européen > Droit civil > Droit de la famille > Divorce
Laurence Mayer, avocat au barreau de Paris [1]
Septembre 2022
Le 1er août 2022, est entré en application le Règlement européen (UE) 2019/1111 du Conseil du 25 juin 2019, dit Bruxelles 2 ter. Son principal effet est la reconnaissance par les Etats membres, du divorce par consentement mutuel sans juge Règlement (UE) 2019/1111 du Conseil, 25 juin 2019
Règlement relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, ainsi qu’à l’enlèvement international d’enfants.
Entré en vigueur le 1er août 2022, ce Règlement fait suite au Règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003, dit Bruxelles II bis, relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale. Il y ajoute plusieurs règles en matières matrimoniale (I), de responsabilité parentale (II) et concernant l’enlèvement international d’enfants (III).
En matière matrimoniale
Le nouveau Règlement n’apporte pas de modification concernant les règles de compétence en matière matrimoniale. De plus, l’impossibilité pour les époux de choisir le juge compétent pour connaître de leur affaire est conservée.
Néanmoins, ce texte apporte une nouveauté en droit européen, en ce qu’il reconnaît le divorce par consentement mutuel non-judiciaire. En effet, ce type de divorce a été introduit en France le 1er janvier 2017. En décembre 2017, l’arrêt Soha Sahyouni/ Raja Mamisch (CJUE, n°C-372/16, Arrêt de la Cour, Soha Sahyouni contre Raja Mamisch, 20 décembre 2017) a précisé que la notion de divorce dans les Règlements Rome III et Bruxelles II bis ne concerne que les divorces prononcés par un juge, une autorité publique ou sous contrôle, ce qui exclut donc les divorces par consentement mutuel par acte d’avocat, déposé au rang des minutes d’un notaire. Ce type de divorce prononcé en France n’était donc pas reconnu à l’étranger.
Désormais, « Les actes authentiques et les accords relatifs à la séparation de corps et au divorce qui ont un effet juridique contraignant dans l’État membre d’origine sont reconnus dans les autres États membres sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure » (article 65 §1 du Règlement (UE) 2019/1111 du Conseil, 25 juin 2019). Ainsi, depuis le 1er août dernier, les divorces par consentement mutuel sont reconnus dans tous les Etats de l’Union européenne. Il est tout de même important de préciser que cette reconnaissance ne s’applique qu’au divorce en lui-même, ses effets continuant de relever du Règlement « Aliments » du 18 décembre 2008.
En matière de responsabilité parentale
Tout d’abord, le Règlement précise la notion d’enfant, qui est défini comme « toute personne âgée de moins de 18 ans » (article 2). Dans une logique de protection de celui-ci et un objectif de faire primer son intérêt supérieur, le texte consacre également le droit de l’enfant d’exprimer son opinion. Il ajoute qu’une décision pourra ne pas être reconnue s’il est démontré que l’enfant a été privé de ce droit au cours de la procédure.
Les règles de compétence n’ont dans l’ensemble pas été modifiées, les juridictions compétentes restent celles de l’ancienne résidence habituelle pendant 3 mois après le déménagement régulier de l’enfant. Mais au contraire des règles applicables en matière matrimoniale, les parties bénéficient désormais de la possibilité de choisir le juge compétent (article 10). Elles doivent alors remplir certaines conditions, à savoir l’existence d’un lien étroit entre l’enfant et l’Etat membre, les parties doivent être mises d’accord sur la compétence du juge choisie, ou n’avoir pas exprimé de désaccord vis-à-vis de la compétence par défaut et le choix doit avoir été fait dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. De plus, il est indispensable que les parties choisissent le juge compétent au plus tard au moment de la saisine de celui-ci. Le paragraphe 2 précise que ce choix doit être inscrit dans une convention écrite, datée et signée par les parties.
Enfin, afin de faciliter certaines situations dans lesquelles une même décision traite d’un droit de visite et d’un autre droit qui ne bénéficie pas du régime privilégié mis en place par le Règlement Bruxelles II bis, le texte de Bruxelles II ter a supprimé l’exequatur pour l’ensemble des décisions relatives à la responsabilité parentale. Ainsi, en la matière, le principe de l’exécution immédiate à toutes les décisions est généralisé.
En matière d’enlèvement international d’enfants
En matière d’enlèvement international d’enfants, le Règlement impose un délai de 6 semaines aux tribunaux de chaque degré de juridiction pour rendre leur décision. L’objectif est ici d’améliorer la célérité des procédures.
Concernant la protection de l’enfant en cas de retour, il est ajouté la nécessité pour le demandeur du retour de fournir des éléments de preuve qui démontrent que des mesures adéquates ont été prises pour assurer la protection de l’enfant à son retour (art 27).
En cas de refus du retour d’un enfant, les autorités de l’Etat d’origine où l’enfant avait sa résidence habituelle avant son déplacement, peuvent tout de même ordonner le retour de l’enfant, il s’agit du mécanisme du « dernier mot » mis en place par le Règlement Bruxelles II bis. Mais ce principe doit répondre à certaines conditions apportées par le nouveau texte. En effet, une procédure doit être introduite sur le fond et tenir compte de plusieurs données : le déplacement, le refus de retour, l’intérêt de l’enfant, ainsi que les conditions d’accueil par les parents dans les deux Etats.