La loi du 3 août 2018 consacre la lutte contre le cyber-harcèlement de groupe et les raids numériques (fr)
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Thierry Vallat, Avocat au Barreau de Paris
Août 2018

Pour lutter contre le fléau que représentent les raids numériques ou "harcèlement de meute" sur internet, la loi du 3 août 2018 permet désormais que tous les participants à un acte de cyber-harcèlement puissent être condamnés et ce, même si cela ne concerne que quelques mails ou tweets, quelques statuts Facebook, quelques messages sur les forums.
Outre la nouvelle infraction d'outrage sexiste destinée à lutter contre le "harcèlement de rue" le gouvernement a entendu pénaliser plus complètement le cyberharcèlement.
Le projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes (qui comporte plusieurs volets comme l'outrage sexiste, la lutte contre l'upskirting ou la drogue du viol et ds dispositions renforçant la lutte contre les infractions sexuelles sur les mineurs), prévoit donc la lutte contre les raids numériques.Cyber harcèlement de meute: le projet de loi [1]
L'idée est que même si vous n’avez participé à du cyber-harcèlement qu’avec quelques retweets, ou quelques messages sur des forums, vous pourrez être condamné comme l'auteur principal à des peines allant jusqu'à trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.
Rappelons que la création d'un délit particulier sur le harcèlement numérique était intervenue en août 2014 avec la création de l’article 222-33-2-2 du Code pénal qui dispose que:
"Le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail.
Les faits mentionnés au premier alinéa sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende :
- Lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;
- Lorsqu’ils ont été commis sur un mineur de quinze ans ;
- Lorsqu’ils ont été commis sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
- Lorsqu’ils ont été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne.
Les faits mentionnés au premier alinéa sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’ils sont commis dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 4°"
Si la pénalisation de ce type de délit existait donc depuis 2014, il était difficile de pouvoir lutter contre le cyberharcèlement de meute qui sévit fréquemment sur internet via les réseaux sociaux.
C'est ainsi que l'article 11 de la LOI n° 2018-703 du 3 août 2018 [2] telle que publiée au Journal officiel du 5 août 2018 renforce l'article 222-33 du code pénal.
Y sont en effet ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« L'infraction est également constituée :
« 1- Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
« 2- Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition. » ;
2° Le III du même article 222-33 est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique. »
De la même manière, après le premier alinéa de l'article 222-33-2-2, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« L'infraction est également constituée :
« a) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
« b) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition. » ;
Le 4° du même article 222-33-2-2 est complété par les mots : « ou par le biais d'un support numérique ou électronique » ;
Retrouvez également notre intervention le 25 janvier 2018 à la Sorbonne pour la Clinique juridique de Paris sur le harcèlement sur Internet : petit aperçu d'un cyber-délit multiforme [3] ainsi que l'interview de Me Thierry Vallat sur BFMTV sur le harcèlement [4]