Le déroulement d’une affaire devant le Conseil de prud’hommes

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Par Valentine Léger
Juriste au Centre de documentation du Barreau de Paris

Le 20 mars 2023



En vertu de l’article R.1452-1 alinéa 1er du Code du travail[1], depuis le 1er janvier 2020, le Conseil de prud’hommes (CPH) est uniquement saisi par une requête faite, adressée ou remise à son greffe. Cette requête doit contenir, à peine de nullité, toutes les mentions des articles 54[2] et 57[3] du Code de procédure civile[4]. En première instance, devant le CPH, la procédure est orale et sans représentation obligatoire.


I. La procédure au fond devant le Conseil de prud’hommes


La phase de conciliation


La phase de conciliation est obligatoire au CPH, à peine de nullité d’ordre public. Il n’y a que l’urgence qui permet de dispenser de cette phase.

Le bureau de conciliation est aujourd’hui appelé bureau de conciliation et d’orientation (BCO). Il est chargé d’orienter l’affaire devant le bureau de jugement compétent. L’article L.1454-1-3 du Code du travail[5] prévoit si, sauf motif légitime, une partie ne comparaît pas, personnellement ou représentée, « le bureau de conciliation et d’orientation peut juger l’affaire, en l’état des pièces et moyens que la partie comparante a contradictoirement communiqués ». Dans ce cas, le bureau de conciliation et d’orientation statuera en tant que bureau de jugement dans sa composition restreinte.

Le BCO doit entendre les parties et c’est seulement en cas d’échec qu’il pourra renvoyer l’affaire devant le bureau de jugement en sa formation soit restreinte, soit classique, soit de départage. Il convient de préciser que, par principe et en vertu de l’article R.1454-8 du Code du travail[6], la séance n’est pas ouverte au public. De plus, si les parties le demandent ou si la nature du litige le justifie, le BCO pourra renvoyer directement l’affaire devant le bureau de jugement en sa formation de départage.

Le rôle du BCO est d’assurer la mise en état des affaires. Sur le fondement de l’article L.1454-1-2 du Code du travail[7], lorsque l’affaire n’est pas en état d’être jugé, le BCO peut assurer sa mise en état et un ou deux conseillers rapporteurs peuvent être désignés. Le ou les conseillers peuvent notamment entendre les parties ou les inviter à fournir des explications nécessaires à la solution du litige, ce qui peut d’ailleurs entraîner une conciliation partielle ou totale des parties[8].

Depuis la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels[9], le BCO, les conseillers rapporteurs désignés ou le bureau de jugement peuvent fixer la clôture de l’instruction par ordonnance, ordonnance qui constituera une mesure d’administration judiciaire[10].


La phase de jugement


C’est ce qu’on appelle le bureau de jugement où les parties sont convoquées par lettre recommandée avec avis de réception. Les décisions s’y prennent à la majorité absolue des voix.

Les parties se voient ensuite notifier le jugement à leur domicile par le greffe du CPH par lettre recommandée avec avis de réception. Il doit être indiqué de manière apparente les voies de recours et modalités sur la notification du jugement afin de faire courir le délai.

Contrairement à la phase de conciliation et selon l’article 433 du Code de procédure civile[11], la phase de jugement est publique.

Depuis le 6 août 2015[12], le bureau de jugement en formation restreinte a vu le jour et est composé paritairement d’un conseiller employeur et d’un conseiller salarié. Selon l’article L.1454-1-1, 1° du Code du travail[13], ce bureau de jugement, en formation restreinte, statue dans un délai de 3 mois sur les litiges portant sur un licenciement ou sur une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

Il existe aussi la formation de référée. Elle est utilisée en cas d’urgence et quand il n’y a aucune contestation sérieuse ou que l’existence d’un différend est justifiée. Les décisions prises sont provisoires, immédiatement exécutoires à titre provisoire et susceptibles d’appel.

Enfin, la procédure accélérée au fond existe depuis le 1er janvier 2020 en lieu et place de la procédure en la forme des référés. Comme la formation de référée, la procédure accélérée au fond est exécutoire à titre provisoire, à moins que le conseil en décide autrement. Les garanties d’impartialité doivent être respectées. En vertu de l’article L.1457-1 du Code du travail[14], « le conseiller prud’homme peut être récusé lorsqu’il a un intérêt personnel à la contestation ou s’il est employeur ou salarié de l’une des parties en cause ».


Les voies de recours


Sur le fondement des articles 527[15] et 542[16] et suivants du Code de procédure civile, l’appel est possible à l’encontre des jugements rendus en premier ressort par le CPH. L’appel se fait devant la chambre sociale de la Cour d’appel sous 1 mois à compter de la notification du jugement ou sous 15 jours si la décision a été rendue en référée. Depuis le 1er août 2016, les parties doivent être représentées par un avocat ou un défenseur syndical devant la Cour d’appel.

Concernant le pourvoi en cassation, selon les articles 974 et suivants du Code de procédure civile[17], la représentation par avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation est obligatoire. Le délai est « de 2 mois et court à compter de la signification du jugement ou de l’arrêt à personne ou à domicile ».


II. La procédure en référé devant le Conseil de prud’hommes


Elle peut être ordonnée par le CPH dans le cadre d’une urgence et lorsqu’il n’y a pas de contestation sérieuse.

Il pourra alors ordonner que l’employeur restitue des documents au salarié, qu’il verse les salaires et indemnités de fin de contrat ou encore, la conservation de preuves ou d’objets litigieux en cours.

L’avantage de cette procédure est le délai de traitement qui est plus court, tout en précisant que l’assistance ou la représentation par avocat n’y est pas obligatoire.

Une fois que l’ordonnance de référée a été obtenue, le salarié ou l’employeur pourra en demander l’exécution par mandat d’huissier de justice.


Sources :


Tilloy Céline, Fasc. 20 : Conseil de prud’hommes – Procédure, Lexis 360 Intelligence, 19 janvier 2022 – MAJ 21 janvier 2023[18]

Dalloz, Fiche d’orientation, Conseil de prud’hommes (Procédure), 1er septembre 2021[19]

Service public, Conseil de prud’hommes (CPH) : déroulement d’une affaire, 3 février 2021[20]

Doukhan Avner, La procédure devant le Conseil de prud’hommes (CPH), doukhan-avocat.fr[21]