La présentation de faux documents durant l’embauche
France > Droit privé > Droit social > Droit du travail
Par Arthur Humez
Juriste au Centre de documentation du Barreau de Paris
Le 05 Avril 2023
Le principe du dol en droit civil
Avant tout, il faut rappeler qu’un contrat de travail est aussi un contrat de droit commun régi par le droit civil qui peut être frappé de nullité par le dol.
En effet, selon l’article 1116 du Code Civil[1], concernant le dol, c’est une nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne présume pas et doit être prouvé.
Ainsi, si le mensonge du salarié concerne un élément important et déterminant pour son embauche, cela peut amener la nullité du contrat du travail. Il faut vraiment que l’élément sur lequel repose le mensonge soit déterminant dans le consentement de l’employeur à embaucher le candidat.
Il ne faut pas oublier que le dol ne se présume pas et donc l’employeur doit prouver l’existence du dol mais aussi que l’auteur du dol donc le candidat ait agi intentionnellement pour le tromper.
Ainsi, une fausse déclaration sur un point qui n'a pas été déterminant pour la conclusion du contrat ne peut entraîner sa nullité.
Par exemple, il a été jugé que le fait pour un salarié de faire mention dans son curriculum vitæ d'un poste occupé pendant un an au titre « d'assistance de la responsable de formation », alors qu'il s'agissait en réalité d'un stage de formation de quatre mois à la direction des études dans le service formation linguistique n'est pas constitutif d'une manœuvre frauduleuse (Cass.soc, 16 Février 1999, n°96-45.565[2]).
De plus, en cours d’instance, en cas d’allégation de falsification de document, il peut aussi appartenir au juge de procéder à une vérification d’écriture dans les conditions prévues par les articles 287 et suivants du Code de Procédure Civile.(Cass.soc, 19 Mai 2022, n°21-10.385[3])
Sa déclinaison en droit du travail durant l’embauche
Par ailleurs, en droit du travail, il faut d’abord rappeler que, selon l’article L.1221-6 du Code du Travail[4], lors d’un entretien d’embauche, le candidat doit répondre de bonne foi aux questions que l’employeur lui pose.
Mais ces questions doivent avoir pour finalité d’apprécier ses capacités à occuper le poste proposé et les informations demandées doivent être en lien direct et nécessaire avec l’emploi. Ainsi, le candidat doit répondre de bonne foi quant à la véracité de ses diplômes et documents qu’ils justifient lors de sa candidature.
Dans un arrêt de chambre sociale de la cour de cassation, celle-ci a admet que l’obligation de loyauté et de bonne foi (Article L.1222-1 du Code du Travail[5]) est remise en cause dès lors le salarié avait menti sur un élément de son CV et que cet élément litigieux avait été déterminant au moment de l’embauche du salarié. (Cass.soc. 25 Novembre 2015, n°14-21.521[6])
Il ne faut pas non plus oublier que c’est à l’employeur qu’il incombe de vérifier les diplômes et titres requis du candidat pour que le poste soit occupé.
C’est ainsi que la cour de cassation a rejeté la demande de nullité du contrat de travail d’un salarié car la société n’avait pas vérifié que la remplaçante était diplômée et inscrite au tableau de l’ordre des pharmaciens et qu’elle ne pouvait donc se prévaloir de sa négligence. (Cass.soc, 9 Juin 2017, n°16-15.244[7])
Les conséquences du mensonge à l’embauche
Enfin, comme le précise l’article 1116 du Code Civil[8], si le mensonge se fait sur un élément important du contrat et déterminant pour le consentement de l’employeur à embaucher la personne, alors cela entrainera la nullité du contrat pour dol.
De plus, en matière pénale, le fait de produire de faux diplômes caractérise un délit de faux que l’on trouve à l’article 441-1 du Code Pénal[9]. Ce délit est puni d’une peine d’emprisonnement de 3 ans et d’une amende de 45 000 euros. Il ne faut pas non plus oublier que le salarié peut se voir condamner pénalement si l’employeur peut caractériser le préjudice subi.
Par ailleurs, le licenciement pour faute grave est justifié dès lors que celui-ci a volontairement menti sur la réalité de sa situation professionnelle et que sa présence passée au sein de l’entreprise mentionnée sur son CV était un élément déterminant pour son employeur lors de son recrutement.(Cass.soc. 25 Novembre 2015, n°14-21.521[10])
Sources :
- Légifrance [11]
- Lexbase [12]
- Editions Legislatives, L’employeur doit vérifier que le candidat possède le diplôme requis avant de l’embaucher, 22 Juin 2017 [13]
- Ministère de l’intérieur, Qu’est-ce qu’un faux et un usage de faux, 28 Décembre 2022 [14]
- David Giabbani, Nullité du contrat de travail – Dol, 20 Janvier 2018 [15]