Les contorsions de la jurisprudence administrative ivoirienne en matière de litiges fonciers

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Jean Pannier, avocat au barreau de Paris
Docteur en droit
Ancien membre du Conseil de l’Ordre
Mars 2024

Le foncier est le principal casse-tête de la plupart des gouvernements africains, c’est aujourd’hui encore un facteur d’insécurité aussi bien pour les Africains eux-mêmes que pour les investisseurs qui, le terrain à peine acheté par devant notaire, voient se manifester un, voire, deux propriétaires bardés de titres sur le même terrain parfois vrais mais souvent falsifiés.

Cette situation qui se durcit d’année en année du fait de l’inflation des prix n’est pas sans issue mais va souvent plonger le dernier acquéreur dans l’enfer du contentieux administratif ou judiciaire.

En Côte d’Ivoire le contentieux de l’annulation des titres fonciers des terrains domaniaux ou assimilés relève de la Chambre administrative de la Cour Suprême devenue récemment le Conseil d’Etat.

Les agences d’Etat [1] ont la haute main sur les attributions de terrains qui, relevant d’une procédure exclusivement administrative, échappent aux notaires. Jusqu’à l’introduction du recours pour excès de pouvoir à l’initiative du professeur agrégé Pierre Claver KOBO qui deviendra président de la Chambre administrative après avoir été longtemps Conseiller, il était impossible de remettre en cause un certificat de propriété délivré par le conservateur de la propriété foncière territorialement compétent. Ce fut une vraie révolution jurisprudentielle qui permit de rétablir dans leurs droits de nombreux propriétaires spoliés par des acquéreurs de bonne ou mauvaise foi [2].

Une banque de données informatique dite COMOE contient toutes les décisions rendues depuis 1986, presque en temps réel. Elle est accessible sur le site consetat.ci

Les règles fixées par la Haute juridiction administrative sont assez simples

1° Tout propriétaire d’origine muni d’un minimum de documents prouvant sa propriété doit d’abord adresser un recours gracieux au conservateur de la propriété foncière territorialement compétent lequel rappelons-le est un agent de l’administration fiscale - comme en France - et relève aussi du Secrétaire d’Etat au Budget également compétent pour recevoir les recours gracieux.

2° L’autorité saisie doit répondre dans le délai de quatre mois qu’elle n’a pas le pouvoir d’annuler le certificat de propriété attaqué seule la Chambre administrative étant l’autorité compétente habilitée à le faire. Muni de la réponse ou en cas d’absence de réponse au-delà du délai, le propriétaire adresse sa requête en annulation à ladite Chambre administrative.

3° Quelques garde-fous sont institués pour limiter les requêtes, ainsi le recours du requérant sera -t-il rejeté s’il est prouvé qu’il avait connaissance de la situation avant de déposer son recours gracieux. Cette jurisprudence peut s’avérer catastrophique car le niveau des connaissances de la population est encore trop faible.

Ainsi le recours d’un investisseur ivoirien pourtant diplômé en économie a-t-il été rejeté alors qu’il avait acquis le terrain à l’Etat et l’avait mis en valeur dans le respect de la réglementation. Il avait pourtant dû se battre en justice pendant plus d’une année contre un ministre de la construction coutumier du fait qui avait donné le terrain à l’un de ses amis sans même prendre la peine d’adresser l’arrêté ministériel de dépossession au légitime propriétaire. Celui-ci aurait dû alors saisir immédiatement le conservateur du lieu [3] . Le recours doit être fait au plus tard dans les deux mois qui suivent le rejet du recours gracieux.

4° Lorsqu’elle est saisie d’une requête en huit exemplaires, la juridiction administrative l’adresse à la partie adverse, au procureur général près la Cour suprême, au ministre de la construction, au conservateur compétent puis, lorsque l’instruction est terminée, elle délivre un rapport qui fait état des réponses ou de l’absence de réponse des destinataires de la requête, de l’examen de la recevabilité et de l’examen au fond.

Les destinataires du rapport ont alors un délai de 15 jours pour fournir leurs observations ultimes à la suite de quoi l’affaire est audiencée puis mise en délibéré. Il s’agit essentiellement d’une procédure écrite, les demandes des avocats pour développer des observations orales doivent être déposées au greffe de la juridiction au moins huit jours avant l’audience.

L’examen de la recevabilité peut devenir un piège

Il faut distinguer deux catégories de situations :

La première catégorie concerne les situations qui ne sont pas déclarées frauduleuses. On l’a vu, l’examen de la recevabilité va permettre d’écarter les maladroits qui ignorent la règle exposée ci-dessus, même s’ils sont de parfaite bonne foi. Il est envisagé de remédier à cette rigueur - pas nécessairement pour les acquéreurs d’origine - au bénéfice du dernier acquéreur dans la chaîne des acquéreurs lorsqu’il en existe plusieurs. C’est encore un projet qui risque de susciter bien des inquiétudes en raison des tentations.

Les premières décisions ne sont pas encore tombées bien qu’on puisse craindre déjà le pire c’est-à-dire une jurisprudence sélective pour ne pas dire partiale. Alors qu’il est urgent de placer tous les requérants sur un pied d’égalité ce qui est loin d’être le cas actuellement compte tenu de certaines dérives de la jurisprudence sur lesquelles nous reviendrons.

La seconde catégorie concerne les situations frauduleuses fort nombreuses. Dans la logique du recours pour excès de pouvoir, la Haute juridiction administrative annule l’acte attaqué, les manœuvres frauduleuses qui prennent le plus souvent la forme de lettres d’attribution de terrains notamment domaniaux ou d’arrêtés de concessions provisoires (ACP) ou encore d’arrêtés de concessions définitive (ACD) considérés comme des actes inexistants.

Les ventes domaniales ne se font pas par devant notaire mais en application d’une réglementation spécifique qui remonte pour partie aux années trente [4] complétée par des textes plus récents fréquemment modifiés. Dans la mesure où les actes frauduleux sont déclarés inexistants, la Haute juridiction administrative aura encore longtemps à traiter des attributions de terrains domaniaux de plus de trente années. Les actes inexistants ne se prescrivent pas.

« Sur le fond : Considérant qu’il est de principe qu’un acte obtenu par fraude est insusceptible de conférer des droits ; qu’il est de jurisprudence constante qu’un certificat de propriété obtenu par des manœuvres frauduleuses encourt annulation » [5].

« Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les certificats de propriété foncière attaqués sont affectés d’illégalités grossières qui en font des actes inexistants ; que dès lors, le requérant est fondé, sans condition de délais, à solliciter leur annulation » [6].

L’acte inexistant ne se prescrit jamais puisqu’il n’a jamais existé ce qui permet de soulever la nullité sans limite de temps. Une école primaire à Abidjan, homologuée par la France et menacée d’expulsion, a pu engager le combat judiciaire grâce à la théorie de l’inexistence plus de trente années après l’acquisition du terrain litigieux par celui qui se considère comme propriétaire, nous y reviendrons.

Concernant l’étape préalable de la recevabilité la Chambre administrative, depuis longtemps a fixé une règle de simple bon sens qui consiste à ignorer cette étape procédurale pour ne pas donner une prime à la fraude lorsque celle-ci est patente. Règle qu’elle ne respecte pas toujours comme on le verra avec l’affaire de l’école homologuée par la France et suivie par l’AEFE. « Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les certificats de propriété foncière obtenus par la SCI RE-BA sur les logements d’astreinte en cause sont entachés d’une violation si grossière qu’ils doivent être regardés comme des actes inexistants ; qu’ils ne peuvent donc produire aucun effet ;

Que dès lors, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner la recevabilité, il échet de déclarer ces certificats de propriété nuls et de nul effet » [7].

La Cour est parfois amenée à annuler d’autres actes que les actes administratifs, par exemple un acte notarié voire un arrêt de cour d’appel.

« Considérant que, conséquemment, cette fraude corrompt les actes subséquents, notamment l’acte notarié de vente du lot par la SCI Rayyan à M. K. et le certificat de propriété obtenu par celui-ci sur son fondement ; que dès lors, les certificats de propriété contestés qui portent une atteinte grave au droit de propriété de Monsieur B. doivent être déclarés inexistants, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité de la requête » [8].

Il n’est pas rare que la Cour utilise des termes forts comme « acte grossièrement frauduleux ».

« Considérant que, de ce qui précède, il résulte que l’acte administratif du 19 janvier 2004 délivré à Monsieur L. K. O. est manifestement inexistant et ne saurait créer des droits et servir de fondement à l’obtention du certificat de propriété foncière ; que, par suite, le certificat de propriété foncière n° 02004522 du 23 avril 2013 délivré à Monsieur D. et le certificat de propriété foncière n° 02004714 du 13 août 2013 délivré à Monsieur DJ. S. et obtenus avec une célérité inhabituelle, sur la base de cet acte faux, doivent être considérés comme grossièrement frauduleux et être déclarés nuls et de nul effet, sans considération de conditions de recevabilité » [9] .

« Considérant que, d’une part, il résulte de la correspondance du 05 décembre 2017 du Directeur du Domaine Urbain du Ministère de la Construction, du Logement, de l’Assainissement et de l’Urbanisme que les lettres d’attribution n°990433/MLU/SDU du 1er mars 1999 et n°990436/MLU du 19 avril 1999, qui ont permis aux Sieurs P. B. Fabien Aiblin et P. B. Christian Wadih Eric de bénéficier respectivement des concessions provisoires des lots numéros 2070 et 2071- 2072 de l’îlot numéro 186, sis à Abidjan Cocody, les Deux-Plateaux, en plus de ne pas faire partie des actes délivrés en 1999 par le Ministre Tiapani Kakou, correspondent pour l’une, à un terrain attribué à Monsieur N’G. à Abobo et pour l’autre, à une lettre d’annulation ;

Que la discordance de ces lettres d’avec les terrains auxquels elles sont censées être rattachées atteste de la gravité de l’irrégularité qui les caractérise ;

Considérant que, d’autre part, les lettres d’attribution de messieurs P.B. Fabien Aiblin et P.B. Christian Wadih Eric ont été délivrés par le Ministre de la Construction et de l’Urbanisme, en méconnaissance des règles de répartition des compétences entre ledit Ministre et la SETU, telles que prévues par le décret n° 87.365 du 1er avril 1987 portant dissolution, mise en liquidation et dévolution du patrimoine de la SETU ; Qu’au moment de leur attribution à Messieurs P. B. Fabien Aiblin et P. B. Christian Wadih Eric, les trois lots litigieux étaient sortis du patrimoine de l’Etat et ne pouvaient faire l’objet de réattribution par le Ministre en charge de la Construction ; Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les certificats de propriété foncière attaqués sont affectés d’illégalités grossières qui en font des actes inexistants ; que dès lors, le requérant est fondé, sans condition de délais, à solliciter leur annulation » [10].

L’arme de la recevabilité reste pourtant une arme à double tranchant lorsque la Cour examine quand même la recevabilité alors que la fraude est manifeste voire grossière.

C’est ce qui est arrivé à l’école Paul Langevin victime d’un bail frauduleux qui n’aurait pas été renouvelé dans le délai légal c’est-à-dire avant les trois derniers mois du bail. Au lieu d’appliquer sa jurisprudence constante en déclarant nuls et inexistants tous les actes qui ont permis de maquiller une acquisition frauduleuse d’un terrain domanial y compris le bail commercial frauduleux la Cour a rejeté la requête des fondateurs de l’école au motif qu’ayant été déchus de leur droit au bail ils avaient perdu toute qualité pour agir. Cette affaire fait tâche.

« Considérant que, selon l’article 3 du code de procédure civile, commerciale et administrative, l’action n’est recevable que si le demandeur justifie d’un intérêt légitime juridiquement protégé, direct et personnel, a la qualité pour agir et possède la capacité pour agir en justice ;

Considérant qu’il appert des pièces et de l’instruction du dossier que, par jugement n° 352 du 1er janvier 2016 rendu par le Tribunal du Commerce d’Abidjan et confirmé par l’arrêt n° 30/18 du 02 mars 2018 de la Cour d’Appel d’Abidjan, les époux D. ont été déchus de leur droit au renouvellement du bail et expulsés tant de leurs personnes, de leurs biens, que de tous occupants de leur chef, du lot n° 737 Bis, îlot 76, situé à Marcory, zone 4/C ;

Qu’ainsi, les époux D., qui, d’une part, ne détiennent aucun acte administratif leur conférant des droits sur le terrain litigieux et, d’autre part, ont été déchus de leur droit au renouvellement au bail et expulsés des lieux par décisions judiciaires, n’ont pas un intérêt légitime juridiquement protégé direct, leur donnant la qualité pour agir ; Qu’il échet, dès lors, de déclarer leur requête irrecevable » [11].

Cette décision étonnante en ce qu’elle consolidait l’acquisition frauduleuse du terrain a fait couler beaucoup d’encre a surtout alerté la structure d’Etat en charge de la gestion du domaine privé de l’Etat qui a immédiatement lancé deux requêtes devant la même juridiction la première dénommée requête en sursis à exécution du titre foncier - pour interdire la vente ou l’hypothèque à la sauvette dans l’attente de l’examen de la seconde requête en annulation dudit titre foncier en vue du retour du terrain dans le giron de l’Etat spolié.

La première requête a déclenché une petite révolution de palais dès lors qu’elle revenait à demander à la chambre administrative d’ouvrir enfin les yeux sur la gravité des fraudes qui avaient permis de spolier l’Etat entre 1986 et 1989.

Pourtant la théorie de l’inexistence des actes frauduleux devait finir par l’emporter dès lors que les actes inexistants ne peuvent se prescrire. Le sursis à exécution fut accordé du bout des lèvres la Cour rappelant préalablement la légitimité de l’action de l’Agence de Gestion Foncière dite AGEF mais sans s’appesantir en termes explicites sur l’inutilité d’examiner la recevabilité dans cette affaire où la fraude dépasse pourtant, en gravité, les 582 affaires de foncier examinées par cette Cour. Il faut préciser, pour comprendre ce qui se tramait en interne que l’arrêt ci-dessous relève du miracle par rapport à ce que laissait entrevoir le rapport :

« Au-delà de la pertinence des moyens soulevés, à la base du recours en annulation du certificat de propriété foncière de monsieur K., qui sera tranchée ultérieurement, il y a lieu de se demander si les conditions du sursis, telles que fixées par l’Article 76 de la loi sur la Cour Suprême, sont réunies en l’espèce.

En d’autres termes, y-a-t-il urgence ?

Le moyen présenté par le requérant est-il de nature à créer un doute sérieux sur la légalité des actes attaqués ? La jurisprudence de la Chambre Administrative, illustrée notamment par les … permettra de dessiner le contour de l’arrêt à intervenir si, bien sûr, la requête franchit l’écueil de la recevabilité au regard de l’article 3 du Code de procédure civile, commerciale et administrative qui dispose que l’action n’est recevable que si le demandeur :

1° justifie d’un intérêt légitime juridiquement protégé direct, personnel ;

2° a la qualité pour agir en justice ;

Aussi, il y a lieu de se demander si la recevabilité d’un recours contre un permis de construire est subordonnée à la possession d’un titre de propriété ».

La contorsion est ici assez spectaculaire car le rapporteur, tout en rappelant que l’AGEF a soulevé de nombreuses fraudes, fait l’impasse sur la jurisprudence constante de la Cour qui n’examine pas la recevabilité en cas de fraudes graves. Quant au permis de construire évoqué, il est totalement hors sujet.

Finalement, le rapporteur qui présidera l’audience aura retrouvé ses lunettes :

« Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 3 du Code de procédure civile, commerciale et administrative, L’action n’est recevable que si le demandeur :

1. justifie d’un intérêt légitime juridiquement protégé direct, personnel ;

2. a la qualité pour agir en Justice.

Considérant que Monsieur K.D. soulève l’irrecevabilité de la requête aux fins de sursis pour défaut d’intérêt donnant qualité à agir à l’AGEF ;

Considérant, cependant, que le terrain litigieux a fait partie du patrimoine de l’ex-SETU dont le successeur, l’AGEF, a intérêt à voir élucider les circonstances de la cession dudit terrain aux consorts M. puis à Monsieur K.D. ; qu’il s’ensuit que cette fin de non-recevoir n’est pas fondée ;

Sur le fond : Considérant que le sursis à l’exécution est, ainsi qu’il résulte des dispositions de l’article 76 de la loi sur la Cour Suprême, une mesure exceptionnelle que peut ordonner la Chambre Administrative lorsqu’il y a urgence et que les moyens présentés par le requérant sont de nature à faire douter de la légalité de l’acte attaqué et que l’exécution dudit acte est susceptible d’occasionner des conséquences irréparables ou manifestement excessives ;

Considérant, en l’espèce, que le terrain litigieux abrite les locaux d’une école exploitée par les époux D. ; que l’expulsion, en cours d’année scolaire, des élèves, risque d’entraîner des conséquences irréparables ;

Qu’il y a lieu, en attendant la décision sur la requête principale, de suspendre l’exécution du certificat de propriété foncière n° 00441 du 30 octobre 2002 délivré à Monsieur K. » [12].

Entre temps la Chambre administrative de la Cour Suprême est devenue le Conseil d’Etat à la faveur d’une loi organique, les audiences ont repris au début de cette année.

Le problème de la légitimité de l’action de l’AGEF étant réglé par la décision précitée du 27 mars 2019, on pouvait s’attendre à un examen au fond des nombreuses fraudes qui ont facilité l’acquisition du terrain sur lequel est bâtie l’école qui s’était fait piéger par un bail frauduleux signé en l’étude du notaire du bailleur comme par hasard.

Que nenni ! le rapport du Conseil d’Etat adressé aux parties pour recueillir leurs observations, décrit les différentes interrogations qu’il énumère pour indiquer qu’elles serviront de pistes pour la solution du litige mais indique in fine « si bien entendu la requête franchit l’écueil de la recevabilité ». Alors que la question a été réglée lors de l’examen de la première requête sur le sursis.

Cette forme d’amnésie est caractéristique des dérives que se permet assez régulièrement et sans complexe la Haute juridiction administrative ivoirienne.

Elle donne ici une lecture très réductrice du mémoire du ministre de la construction qui pourtant conclut en ces termes, après avoir épinglé les fraudes qui commencent par l’attribution d’un terrain domanial à deux personnes qui ignoraient l’usurpation de leur identité et dont les dates de naissance figurant au dossier sont fausses :

« Cette attribution a violé sans aucun doute le décret n 0 71-74 du 16 février 1971 relatif aux procédures domaniales et foncières. Aux termes des dispositions de l’article 4 du décret susvisé, toute attribution de terrain urbain est subordonnée à, entre autres formalités préalables, une demande adressée à l’autorité territorialement compétente.

Cette solution a été retenue par la Chambre Administrative dans son arrêt n0 80 du 23 mai 2012 rendu dans l’affaire Madame F. contre Ministère de la Construction, qui a annulé les actes administratifs pris au profit de cette dernière au motif que la délivrance desdits actes n’était subordonnée à aucune demande auprès des services du Ministère de la Construction.

Les actes d’attribution suscités n’ayant pas satisfait à ces exigences méritent annulation.

Toutes ces irrégularités ont donc inévitablement corrompu les actes administratifs pris subséquemment au profit de Monsieur K. Les actes d’attribution n’ayant pas satisfait aux exigences de la règlementation méritent annulation ».

Les commentateurs s’étonnent qu’à peine installé - il ne l’est d’ailleurs pas tout à fait - le Conseil d’Etat ne se rende pas compte de l’image qu’il renvoi.

Le Procureur général près la Cour Suprême répondant au rapport tente un sauvetage en haute mer en rappelant à la Haute cour sa propre jurisprudence.

« Les actes administratifs contestés délivrés en dehors de la procédure prévue par le décret n° 87-365 du 1er avril 1987 sont entachés d’une illégalité qui incline à les déclarer inexistants. La requérante présente donc un moyen sérieux d’annulation, d’où il suit que son recours en annulation pour excès de pouvoir doit être déclaré bien fondé ; il convient en conséquence annuler le certificat de propriété attaqué » [13].

Notre Conseil d’Etat appréciera qu’on utilise le même nom pour rendre une justice sélective parfois basée sur des considérations qui n’ont rien à voir avec le droit.

Références

  1. Société d’Exploitation des Terrains Urbains dite SETU dissoute en 1987, la direction des Grands Travaux et, née en 2000, l’Agence de Gestion Foncière dite AGEF, toutes trois investies d’une mission de service public ou encore les autorités préfectorales hors des grandes villes
  2. Arrêt n° 19 du 21 mai 2008 Deflorin c/ Ministre de la construction/ Arrêt n° 55 du 17 décembre 2008 Touré Abiba c/ Ministre de l’économie et des finances et directeur du domaine/ Arrêt n° 55 du 23 juin 2010 Wilson Tété c/ Conservateur de la propriété foncière.
  3. Arrêt n° 86 du 18 mai 2016.
  4. Arrêté promulguant en AOF le décret du 26 juillet 1932 portant réorganisation du régime de la propriété foncière en AOF/ Arrêté n° 2164 du 9 juillet 1936 modifié par l’arrêté n° 83 du 31 janvier 1938 réglementant l’aliénation des terrains domaniaux en Côte d’Ivoire.
  5. Arrêt n°28 du 26/02/2014.
  6. Arrêt n°36 du 23/02/2019.
  7. Arrêt n° 78 du 25 mars 2015.
  8. Arrêt n° 143 du 22 octobre 2014.
  9. Arrêt n° 33 du 15 février 2017.
  10. Arrêt n° 36 du 20 février 2019.
  11. Arrêt n° 159 du 23 mai 2018.
  12. Arrêt n° 71 du 27 mars 2019.
  13. Conclusions du Ministère Public du 25 février 2020.