Procès des attentats du 13 novembre 2015 - Le Live Tweet - Semaine DIX

Un article de la Grande Bibliothèque du Droit, le droit partagé.


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Retrouvez sur cette page tous les tweets du procès issus des Live tweets de @ChPiret Charlotte Piret et @sophparm Sophie Parmentier ; elles suivent ce procès pour France Inter et nous ont donné l'autorisation de compiler leurs tweets dans un objectif de consultation et archivage.

(© Photo "Salle d'audience" Sophie Parmentier |Twitter)



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Semaine DIX

Jour 41 – Mardi 9 Novembre – Auditions de deux enquêteurs de la DGSI sur le contexte syrien

Bonjour à tous, de retour au procès des attentats du 13 Novembre pour la 10e semaine, 41e jour d'audience.

Cette 10e semaine ne comptera que deux jours d'audience. En raison du 11 novembre, mais aussi de la proximité de la date de commémoration des attentats du 13 novembre demain, la journée sera consacrée aux auditions de François Hollande et de Gilles Képel.

Aujourd'hui, il sera question du contexte syrien avec les auditions de deux enquêteurs de la DGSI.

L'audience reprend. Avec de nouvelles demandes de constitutions de parties civiles, en l'occurrence des membres des forces de l'ordre, primo-intervenants. "Il n'est pas nécessaire d'être dans le viseur d'une kalachnikov pour être victime de terrorisme", plaide leur avocat.

"Ils sont intervenus avec un casque en plastique, sans préparation particulière. Ce sont des victimes des actes de terrorisme dont vous avez à juger", développe encore leur avocat.

"Nul ne conteste le traumatisme qui a pu être le leur", indique Nicolas Braconnay, avocat général. "Il ne reste qu'ils n'ont été exposés à aucun tir, n'étaient dans le périmètre d'une explosion. Ce sont donc des témoins malheureux au sens où l'entend la cour de Cassation".

La connexion avec la salle de vision conférence est lancée pour l'audition du témoin 565SI, enquêteur de la DGSI qui témoigne anonymement. Il apparaît en ombre chinoise derrière une vitre opaque.

Témoignage n°1 -Enquêteur 565SI, commissaire général (domaine : contre-terrorisme)

Enquêteur 565SI : "je suis commissaire général à la DGSI et j'ai exercé jusqu'à assez récemment des fonctions dans le domaine du contre-terrorisme. Je voudrais exprimer ma profonde compassion pour toutes les victimes du terrorisme dans le monde".

Enquêteur 565SI : "cette présentation va couvrir la période qui va de 1995 à fin 2012 avec le démantèlement de la cellule de Cannes-Torcy." "En 2012, on va observer une évolution dans les processus de radicalisation."

Enquêteur 565SI : "on va voir un nombre croissant d'individus qui vont basculer dans l'idéologie djihadiste via internet. L'avènement des réseaux sociaux va très largement accélérer la dynamique. Avec des individus dispersés sur le territoire national qui vont pouvoir échanger".

Enquêteur 565SI : "on a plus de 1400 Français ou individus partis de France qui vont se rendre en zone irako-syrienne. Voilà pour les éléments de contexte."

Enquêteur 565SI : "quelques éléments aussi sur la notion de djihad. On distingue le grand djihad qui est une lutte intérieure et le petit djihad qui est une lutte armée. Il peut être défensif ou offensif pour étendre la oumma, la communauté, sur d'autres territoires."

Enquêteur 565SI : "En l'an 750, la dynastie de Omeyyades va être vaincue. Un nouveau calife va déplacer la capitale de Damas à Bagdad et un consensus va se faire sur l'importance d'une autorité légitime pour proclamer le djihad."

Enquêteur 565SI : "mais quelques personnalités vont émerger dans les courants de pensées. Le premier courant de pensée est le salafisme qui va marteler le respect des dogmes fixés par les pieux ancêtres, en l'occurrence le prophète et ses compagnons."

Enquêteur 565SI : "la pensée salafiste a évolué au cours des siècles, elle s'est affinée autour de trois grands principes : l'unicité de Dieu, le retour à la religion des pieux prédécesseurs et l'idée d'une communauté islamique supranationale".

Enquêteur 565SI : "les Frères musulmans vont émerger et prôner le choix d'un salafisme quiétiste. Ils vont aussi faire le choix de l'action publique. Une autre figure est celle de Sayyid Qotb qui va faire le choix d'un salafisme combatif."

Enquêteur 565SI : "En 1979, trois événements majeurs vont secouer le monde islamique : la proclamation d'une république islamique en Iran, une prise d'otage à la Mecque par des jeunes Saoudiens pour dénoncer l'impiété de leurs dirigeants, l'invasion soviétique en Afghanistan."

Enquêteur 565SI : "L'Afghanistan va devenir le théâtre majeur du djihad défensif. On va voir des madrasas, des camps d'entraînements se monter. Et on va voir émerger un jeune Saoudien : Oussama Ben-Laden qui va participer au financement de cette organisation."

Enquêteur 565SI : "En 1991, Ben Laden va rompre avec le régime saoudien. Et il va développer une stratégie qui va reposer sur le terrorisme international avec, en 1993, un premier attentat contre le World Trade Center avec six personnes tuées et plus d'un millier de blessées".

Enquêteur 565SI : "fin 1996, l'Afghanistan contrôlé à 80% par les Talibans. On va avoir les attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1999. En 2002, un attentat contre une synagogue à Djerba, au Maroc en 2003 ou à Londres en 2005."

Enquêteur 565SI : "mais la stratégie de djihad global d'Al-Qaïda va commencer à être débordée par un nouveau projet : celui de l'état islamique dont la priorité est l'installation durable sur un territoire donné et la restauration du califat, prononcée en 2014 à Mossoul."

Enquêteur 565SI : "La France, elle, va d'abord être la cible du groupe islamique armé (GIA) algérien. Elle est frappée par plusieurs actions en Algérie avec l'assassinat de deux géomètres français, l'assassinat des moines de Tibhirine, le détournement du vol Air France etc."

Enquêteur 565SI : "et puis, elle va être frappée par une série d'attentats en 1995. La cellule démantelée regroupe des jeunes algériens, pilotés par deux cadres venus d'Algérie et financés depuis Londres."

Enquêteur 565SI : "au cours des années 2000, Al-Qaïda central va considérer la France comme une cible légitime mais pas forcément prioritaire. Les choses vont changer à partir de 2004 avec l'adoption de la loi contre le port de signes religieux dans les lieux publics"

Enquêteur 565SI : "en 2005, on a la crise des banlieues et la republication par Charlie Hebdo de certaines caricatures du prophète. Al-Qaïda va alors directement cibler la France comme ennemie."

Enquêteur 565SI : "à la fin des années 2000, on voit émerger une mouvance endogène, portée par une nouvelle génération. On voit apparaître des forums djihadistes. Le plus important est Ansar Al-Haqq, forum francophone qui aura un succès majeur avec 3600 personnes en 2012."

Enquêteur 565SI : "en 2010, c'est la naissance d'un groupuscule Forsane Alizza, première concrétisation de la mouvance endogène."

L'enquêteur 565SI détaille maintenant les différentes filières djihadistes qui se sont succédées en France. Au départ, dans les années 1990, ce sont essentiellement les filières bosniennes, rejointes par une vingtaine de Français dont de nombreux Roubaisiens.

Enquêteur 565SI : "après les filières bosniennes, on voit apparaître les 1eres filières afghanes. C'est à partir de 1996 et l'arrivée au pouvoir des Talibans que l'Afghanistan devient un vrai sanctuaire pour la mouvance islamique avec des volontaires qui arrivent du monde entier"

Enquêteur 565SI : "après le 11 septembre 2001, on a le tarissement des filières d'Al-Qaïda. Six Français seront d'ailleurs interpellés et transférés dans la prison de Guantanamo".

Parmi les figures de ces filières afghanes, l'enquêteur 565SI cite Abdelnasser Benyoucef. Il est considéré comme le commanditaire de l'attentat de Charlie Hebdo en janvier 2015. Sa femme, Sonia Mejri, aujourd'hui incarcérée en France, doit être entendue au cours de ce procès.

Après les filières afghanes, viennent les filières tchétchènes avec "une quinzaine de volontaires français ou liés à la France", dont Zacharias Moussaoui "qui a été vraisemblablement destiné à intégrer les commandos des attentats du 11 septembre 2001", explique l'enquêteur 565SI.

Alors que l'enquêteur 565SI s'apprête à évoquer les filières endogènes, le président annonce "une courte pause". "On reprendra votre audition après". Suspension donc.

L'audience reprend pour la suite de l'audition de l'enquêteur 565SI. Il est question de l'émergence "d'un nouveau type de filières endogènes, totalement déconnectées des réseaux djihadistes internationaux. Ces filières vont avoir la particularité d'être assez rudimentaires".

Enquêteur 565SI : "en France, deux filières vont se constituer : la filière dite des Buttes-Chaumont qui va regrouper des individus autour de Farid Benyettou qui va devenir un référent religieux et exhorter ses élèves à rejoindre le djihad."

Enquêteur 565SI : "cette filière va envoyer des volontaires à Damas, où ils sont pris en charge par des passeurs vers l'Irak." Parmi les candidats au départ de cette filière : Chérif Kouachi, auteur avec son frère de l'attaque contre Charlie_Hebdo_en janvier 2015.

Enquêteur 565SI : "la deuxième filière qui a émergé c'est la filière d'Artigat, du nom d'une commune de l'Ariège où s'est installé un Syrien d'obédience salafiste." Olivier Corel va ainsi rassembler des adeptes dont les frères Clain, tous deux accusés de ce procès.

L'enquêteur 565SI poursuit, pour la 3e et dernière partie de son intervention, avec un focus sur les années 2010-2021 qui constituent "une première structuration à l'échelle nationale et la reprise des attentats en France".

Enquêteur 565SI : "en 2020, Forsane Alizza est créé sur internet. On va voir sur ce site de nombreux articles qui appellent à la violence, avec des propos antisémites, antifrançais. Forsane Alizza va organiser plusieurs actions d'éclats : manifestations, actions de soutien etc."

Enquêteur 565SI : "le groupe a été administrative interdit, démantelé judiciairement. mais on verra un certain nombre des adeptes de Forsane Alizza qui vont rejoindre la zone irako-syrienne."

Enquêteur 565SI : "2012 c'est aussi la reprise des attentats, avec les attentats perpétrés par Mohamed Merah. Merah a suivi une trajectoire délinquante. En 2008, il se retrouve en prison et se tourne vers la religion. Il va se livrer à une lecture très intensive du Coran."

Enquêteur 565SI : "c'est en 2009 qu'on a le basculement dans l'idéologie djihadiste de Mohamed Merah. En 2010, il rejoint l'Afghanistan et repart au Pakistan en août 2011 et va suivre un entraînement accéléré au maniement des armes. Puis revient en France perpétrer ses actions".

Enquêteur 565SI : "la 2e action sur le territoire national est celle de la cellule Cannes-Torcy. En septembre 2012, deux individus ont lancé une grenade contre une épicerie cacher de Sarcelles. La cellule sera neutralisée avec l'interpellation de complices à Torcy et à Cannes"

Fin de l'audition de l'enquêteur 565SI. "Merci pour cet exposé très très complet", déclare le président. "Pour ma part, je n'ai pas de question". L'avocate générale, Camille Hennetier, en revanche, en a une sur "la place de la Belgique dans l'histoire de ces filières djihadistes"

Enquêteur 565SI : "la Belgique a eu à peu près la même place que la France. Je vous ai évoqué Djamel Beghal, qui avait des projets d'attentats contre l'ambassade américaine, il avait comme complice des Belges. Il y avait de fortes interactions."

Nicolas Braconnay (AG) : "quelle est la place de l'antisémitisme dans l'élaboration de cette idéologie djihadiste ?" Enquêteur 565SI : "il a toujours été très présent dans cette idéologie."

Nicolas Braconnay (AG) évoque "la relative accalmie pendant 15 ans" dans les attaques djihadistes. Enquêteur 565SI : "la France n'était pas considérée comme une menace principale par Al-Qaïda. Et à l'époque il s'agissait de filières structurées, plus facile à démanteler".

Me Mouhou (PC) : quel est l'objectif final des organisations terroristes ?" Enquêteur 565SI : "pour Al-Qaïda, c'est de pouvoir étendre l'idéologie djihadiste dans le monde entier. L'Etat islamique c'est une vision plus territorialisée avec l'instauration d'un califat au Levant."

Me Maktouf (PC) pose une question sur la "collaboration entre la DGSI et la DGSE" Enquêteur 565SI : "est ancienne et permanente. Elle s'est renforcée avec des échanges entre les directions et des échanges de personnels. Cette collaboration est très forte."

Me Issa Gultaslar (défense) : monsieur le commissaire, vous avez parlé de l'Afghanistan comme terre du djihadiste depuis 1979 ? Enquêteur 566SI : oui - Pouvez-vous dire qui a soutenu pendant 10 ans les djihadistes en Afghanistan ? - je ne peux pas répondre à cette question

Me Olivia Ronen (défense) : "il est communément admis qu'il y a eu des tortures à Guantanamo. Vous pensez que c'est digne d'un état démocratique ?" Enquêteur 565SI : je ne suis pas là pour porter des jugements. Président : on n'est pas en train de juger Guatanamo, il me semble

Me Nogueras (défense) : vous considérez que le 13 Novembre s'inscrit dans la définition du djihad global ?

Enquêteur 565SI : il s'inscrit dans les velléités de porter le djihad dans les terres de l'ennemi. La France a été directement ciblée par le porte-parole de l'Etat islamique

Enquêteur 565SI : "La France est considérée comme une terre hostile à l'islam. Et les cibles visées le 13 Novembre étaient des bars, des salles de spectacles, bref tout ce qui est détesté par cette mouvance".

Témoignage n°2 -Enquêteur 562SI

Fin de l'audition de l'enquêteur 565SI. Derrière la vitre opaque, il est remplacé par un autre enquêteur de la DGSI, qui se présente sous le matricule 562SI. Courte suspension le temps qu'il s'installe.

Enquêteur 562SI : "l'état islamique arrive à une apogée territoriale fin 2014. Ensuite, ce sont les débuts des frappes de la coalition internationale. Et en 2015, l'état islamique compte un certain nombre de revers notamment à partir de la reprise de Kobane par les Kurdes."

Enquêteur 562SI projette une courbe statistique des départs vers la zone irako-syrienne : "1467 résidents français sont partis en Syrie. Le maximum des départs c'est en 2014-2015 : 67% des départs. Il faut aussi compter les 900 velléitaires qui ont cherché à se rendre sur place"

Enquêteur 562SI : "au total dans le monde, c'est près de 30 à 40 000 personnes qui ont rejoint : plus de 2000 Marocains, plus de 3000 Tunisiens, des gens d'Asie centrale etc. Et environ 6000 européens dont les Français constituent un important contingent".

Enquêteur 562SI diffuse également une carte de France avec la provenance géographique des djihadistes français : "l'ensemble du territoire français a été concerné à un titre ou un autre." "On avait là, un phénomène exceptionnel : on a fait plus de 700 enquêtes sur les filières"

Enquêteur 562SI : "les facteurs d'attraction qui ont conduit autant de gens à rejoindre l'état islamique sont la proximité du territoire et l'usage des réseaux sociaux qui ont permis de se dispenser d'appartenir à une filière structurée pour avoir des faux papiers etc."

Enquêteur 562SI : "la zone [irako-syrienne ndlr] était facile d'accès par la proximité et le coût : on a vu des mineurs de 14 ans y arriver tout seuls, des familles entières en voiture, en camping-car, téléguidées par des passeurs sur zone."</nowiki>

Enquêteur 562SI : "en novembre 2015, on a effectué plus de 1000 signalements auprès des services turcs mais ça n’empêchait pas les gens de passer. La plupart du temps ils partaient pour une zone touristique puis passaient par des chemins de traverse."

Enquêteur 562SI : "les réseaux sociaux ont permis de diffuser la propagande de l'état islamique. On a vu apparaître des influenceurs, qui encourageaient les gens à partir. "

Parmi les sources d'informations, explique, l'enquêteur 562SI, celles récupérées sur zone de combat par les militaires "en 30 min avant qu'ils reçoivent des tirs de mortiers". Parmi ces éléments, "des listes d'enrôlement" dans l'état islamique. Beaucoup sont détenues par le FBI.

Enquêteur 562SI : "nous avons retrouvé des documents pour environ 500 djihadistes français", explique l'enquêteur 562SI. Avis de décès, attribution de logement, contrat de mariage etc. Des documents généralement en arabe, "avec des kounya qu'il faut attribuer".

Enquêteur 562SI : "le projet global du califat est de s'implanter dans toute la société. Bon, je vais pas vous faire un dessin, ce n'est pas un état démocratique. Parmi les éléments importants de ce projet : la famille. Un tiers des français qui y sont partis étaient des femmes"

Enquêteur 562SI : "on estime qu'il y a eu [au sein de l'état islamique, ndlr] 600 enfants français dont 250 à 300 nés sur place. Les familles recevaient des émoluments en fonction de la taille de la famille, du nombre de femmes, d'enfants."

Enquêteur 562SI : "les enfants sont endoctrinés, on voit des enfants s'entraîner à balles réelles sur des prisonniers, ils participent à des exactions ou des assassinats organisés". Il projette une capture d'écran d'une vidéo "d'un enfant qui s'apprête à égorger un prisonnier"

Enquêteur 562SI fait également projeter des photos d'exécution de l'état islamique : "là, un voleur à qui on coupe la main, là des homosexuels qu'on jette d'immeubles. Et enfin, les corps sont exposés sur la place publique. On se souvient des têtes coupées à Raqqa"

Enquêteur 562SI : "nous avons des personnes qui ont décrit les tortures, les nuits d'horreurs, les viols, dans le stade de Raqqa des cages de 1 mètre sur 50 cm dans lesquelles on pliait les gens en deux pendant des heures. Bref, l'horreur [perpétrée par l'état islamique ndlr]"

Enquêteur 562SI : "en 2014, l'état islamique a attaqué les Yézidis, ils ont systématiquement tué les hommes et asservi les femmes et les enfants en le justifiant par des préceptes religieux. Des Français en ont bénéficié, des dossiers ont été ouverts pour crime contre l'humanité"

Enquêteur 562SI évoque également l'appareil de propagande de l'état islamique : "des radios, des revues qui mettent en scène l'assassinat d'otages, publient des testaments posthumes, justifient les attentats. Ces outils sont ensuite diffusés par des vecteurs de communication"

Enquêteur 562SI : "dès 2004, l'état islamique a des propagandes violentes et met en avant des vidéos d'exécution d'otages avec une surenchère dans la barbarie avec une mise en scène, des ralentis, empruntant les codes du cinéma". Il diffuse six photos d'exemple d'assassinats.

"Finalement", conclut l'enquêteur 562SI au sujet de la propagande de l'état islamique, "être un tortionnaire permet d'être un héros. Ce qui est rarement le cas dans un monde normal."

Enquêteur 562SI : "à partir de 2014, il y a une montée en puissance d'une campagne" d'attentats sur le sol français. Avec, l'interpellation de deux membres de la cellule de Cannes-Torcy. "On a vu également Mehdi Nemmouche", auteur de l'attentat du musée juif de Bruxelles.

Enquêteur 562SI évoque la structure dédiée à la planification d'attentats dans les pays extérieurs : les "OPEX" dans le jargon de l'état islamique. Parmi les cadres de cette structure : Oussama Atar, accusé de ce procès. Il est absent mais son frère, Yacine Atar est dans le box.

Enquêteur 562SI : "le grand nombre de migrants qui sont entrés en Europe en 2015 est apparu comme une opportunité pour rentrer en Europe et c'est la voie qui a été empruntée par les commandos du 13 Novembre ".

Enquêteur 562SI : "l'année 2015 commence avec Charlie Hebdo, dont l'un des acteurs s'est revendiqué de l'état islamique, puis le 15 janvier, Verviers avec l'intervention des forces belges, le 19 avril Sid-Ahmed Ghlam se blesse alors qu'il s'approche de l'église de Villejuif"

Enquêteur 562SI poursuit avec "le 21 août 2015, l'attaque du Thalys. Ensuite, l'attaque du 13 Novembre Ce qu'on peut retenir c'est qu'ils ont envoyé des gens plus aguerris que précédemment. Les attaques se sont poursuivies en mars 2016 à Bruxelles et d'autres projets entravés"

L'enquêteur 562SI liste les pays dans lequel des attentats ont été organisés par l'état islamique : "Royaume-Uni, Allemagne, Turquie, Iran, Arabie Saoudite etc." "L'état islamique a occasionné des douleurs partout dans le monde" "

'Puis, en 2016, c'est la transition entre les attaques projetées [depuis la Syrie par l'état islamique ndlr] vers celles des individus en France, encouragés par l'état islamique, jusqu'à celles simplement encouragées par la propagande" poursuit l'enquêteur 562SI.

Enquêteur 562SI évoque enfin "la menace carcérale qui tient au fait d'un grand nombre de détenus pour terrorisme en prison et qui côtoient des détenus de droit commun qui se radicalisent". Fin de son exposé. "Merci pour cette déposition très riche", salue le président.

Président : "à quelle date a lieu la 1ere intervention des forces françaises sur le sol syrien et pas irakien ?" Enquêteur 562SI : je ne sais pas si les forces françaises sont intervenues en Syrie. Mais il me semble que la coalition internationale intervient à partir de fin 2014.

Camille Hennetier (AG) : "est-ce que vous faite un lien entre la proclamation du califat et les départs vers la zone ?" Enquêteur 562SI : "ça a créé probablement un appel d'air. Ça a contribué au succès des filières. Ça a attiré du monde."

Nicolas Braconnay (AG) : "sur les fiches remplies par les nouveaux arrivants [au sein de l'état islamique ndlr], quelles sont les fonctions qui leur étaient proposées ?" Enquêteur 562SI : "ils pouvaient être combattant, combattant en se faisant exploser, martyr ou infirmier".

Ce moment où, au détour d'une question de l'avocat général, l'enquêteur de la DGSI 562SI lâche, "si j'ai dit une bêtise, ne soyez pas étonnés".

"Est-ce que vous avez le profil type des personnes parties faire le djihad ?" demande un avocat de parties civiles. Enquêteur 562SI : "chez les hommes, ils étaient pour une moitié déjà connus de la police. Bon, aujourd'hui, je ne sais pas si ça veut dire grand-chose."

L'enquêteur 562SI poursuit sur le profil des djihadistes : "c'est pas les premiers de la classe en général. Vous avez parfois un ingénieur, j'ai même vu un médecin partir là-bas, mais bon c'est pas le gratin. C'est plutôt des individus frustrés en général."

Me Nogueras (défense) : "est-ce que l'état islamique apprend de ses échecs et, en fonction, changent les organisateurs et ses modes opératoires ?" Enquêteur 562SI : "oui, pour le 13 Novembre on a des endurcis et ils empruntent la route des migrants"

Me Nogueras (défense) : "pourquoi si la menace est présente très tôt, les interdictions de sortie du territoire, les mesures administratives n'arrivent qu'après les attentats du 13 Novembre ?" Enquêteur 562SI : "en 2012-2013, la situation était relativement confuse".

Enquêteur 562SI : "en 2012, il y avait un nombre important de groupes sur place. Ça rendait difficile l'appréhension de ces départs [vers la zone irako-syrienne ndlr]. C'était compliqué de savoir où allaient les gens. Aujourd'hui, c'est facile de regarder dans le rétroviseur."

Me Nogueras (défense) : "ce n'est pas une critique, mais comment pouvez-vous dire que vous ne vous êtes pas intéressés aux profils psychologiques et dans le même temps qu'ils sont tous partis [en zone irako-syrienne, ndlr] avec le goût du sang dans la bouche casser du chiite ?"

Enquêteur 562SI : "tout le monde n'a pas envie de couper des têtes en Syrie, mais on ne peut pas ignorer en allant là-bas qu'on participe à une organisation qui fait cela. Mais sur les profils psychologiques, je suis prudent. "

Enquêteur 562SI : "les Français auraient peut-être pu combattre Bachar Al-Assad autrement. Il y a eu quelques cas de gens qui ont rejoint l'Armée syrienne libre, mais ils se trouvent que la majorité des Français a choisi l'état islamique".

Interrogé sur le fait que tous les membres des commandos du 13 Novembre n'étaient pas francophone, l'enquêteur 562SI lâche : "en même temps, il n'y a pas besoin de parler français pour se faire exploser. Ils étaient plutôt choisis pour la confiance qu'on portait en eux".

Fin de l'audition de l'enquêteur 562SI. L'audience est suspendue. Elle reprendra demain à 12h30 avec l'audition de l'ancien président de la République, François Hollande.

Jour 42 – mercredi 10 novembre 2021 – Audition de François Hollande

Semaine 10, jour 42 au procès des attentats du 13 Novembre. La cour doit entendre François Hollande, qui était président le 13 Novembre 2015 et que les terroristes ont nommé dans leurs revendications au Bataclan. Foule de micros, caméras, effervescence en attendant.

L'audience reprend. Jour 42. Semaine 10.

Le président : "Bien nous avons aujourd’hui deux témoignages prévus et il y a des avocats de la défense qui s’opposent à certains témoignages, je vais leur donner la parole

Me Marie Violleau, une avocate de Abrini commence à plaider. "Je suis impressionnée".

Me Marie Violleau dénonce le fait que cinq témoins soient appelés à déposer devant la cour : Mohamed Sifaoui, Georges Fenech, Gilles Kepel, Hugo Micheron, Bernard Rougier

Me Marie Violleau : "A Rome, les témoins de nuit n’étaient pas acceptés. Alors accepter de les faire venir, c'est faire reculer l’Histoire, ne pas vous aider dans la recherche de la vérité" pour ce Procès

Me Marie Violleau : "Je ne suis pas là pour juger de leur qualité de leur travail", elle explique que ce n'est pas le problème, mais elle estime qu'à ce Procès, "ce n’est pas un débat d’idées, c’est un débat sur les faits"

Me Ménya Arab-Tigrine, une avocate de Ali El Haddad El Asufi renchérit, dénonce elle aussi que viennent témoigner Hugo Micheron, Gilles Kepel et François Hollande

: "Peut-être leur avis est intéressant, mais ils ne sont pas témoins des faits"

Me Ménya Arab-Tigrine : "Ils veulent que le procès soit une tribune politique. C'est pas ça le procès pénal"

Me Martin Méchin, autre avocat de Ali El Haddad El Asufi a une question plus globale : "qu'est-ce qu'on veut faire de ce procès ? Qu'est-ce que vous voulez faire ?" demande-t-il à la cour.

Me Martin Méchin : "Qu'est-ce qu'on ne veut pas faire ? Une cérémonie de commémoration et une tribune... Les fautes des services, ce n'est pas le sujet, pas le débat, il y a eu une commission d'enquête parlementaire"

Me Méchin : "La question qui se pose pour M. Hollande et M. Kepel, c'est qu'est-ce qu’ils peuvent nous dire des accusés ?"

Me Méchin : "Quand je suis arrivé place Dauphine et que j'ai vu le nombre de journalistes, je me suis dit qu'on avait eu raison de s'opposer à François Hollande".

Me Méchin : "Vous ne devez pas faire de ce procès une tribune politique. Ce que nous vous demandons, c'est de refuser d'entendre ces témoins"

Me Kempf, qui défend Yassine Atar s'oppose lui aussi à la venue de François Hollande. "On ne sait pas pourquoi les parties civiles souhaitent les faire citer"

Me Kempf parle de ce qu'il a appris ce matin dans le journal Libé et en écoutant

France inter et s'emporte contre ce qui est appris en dehors du Prétoire. Mais Charlotte Piret de France inter a juste cité ce qui avait été entendu à ce procès le jour de l'appel des témoins.

Me Kempf : "Je défends un homme qui lui ne fait pas de procès politique, qui clame son innocence"

Me Xavier Nogueras, avocat de l'accusé Amri se lève pour plaider un autre point de vue : "Pourquoi ferions-nous l’économie de l’audition de quelqu’un qui est considéré comme le mobile ?" Les terroristes du 13 Novembre ayant cité François Hollande dans leurs revendications au Bataclan

Me Xavier Nogueras rappelle que les terroristes du 13 Novembre ont dit qu'ils voulaient frapper l'Etat français, "qui mieux que François Hollande représente l’Etat le 13 Novembre ?"

L'avocat de Life for Paris Me Delas estime que François Hollande "est au cœur de ce dossier", il assure qu'aucune question ne sera posée à François Hollande en dehors de ce qui intéresse le procès

Me Maktouf, avocate de parties civiles : "Je suis dans la même disposition que ma consœur de la défense. Moi aussi j'ai peur aujourd'hui. Peur que l'on prive la cour". Elle pense que les experts tels  Micheron Hugo peuvent éclairer la cour sur la pensée des accusés.

Me Maktouf "pense qu’il s’agit d’écarter des témoins jugés gênants pour la défense" et elle demande à la cour de les entendre

Me Morice, autre avocat de parties civiles, pense qu'entendre François Hollande est normal sur le 13 Novembre et "en ce qui concerne les sociologues, je ne partage pas la nécessité de leur présence, on les voit partout sur les plateaux de télévision depuis des années"

Me Morice pense "utile à la manifestation de la vérité que M. Fenech soit entendu comme témoin"

Me Topaloff s'offusque qu'on traite ainsi les chercheurs qui seraient "disqualifiés pour avoir été sur des plateaux télé, je laisse Me Morice balayer devant sa porte". Brouhaha. Me Topaloff : "Je ne vous ai pas interrompu, pourtant j'en ai eu envie"

Me Topaloff : "Citer un témoin est un droit, on n’a pas à apporter l'opportunité", elle rappelle que le témoin doit juste être entendu sur les faits

Me Victor Edou, avocat de parties civiles, se lève pour un point de droit et rappelle que juridiquement, on ne peut empêcher la venue d'un témoin s'il s'exprime sur les faits, or on ne peut présumer avant ce qu'il va dire à la barre

Victor Edou qui au passage rappelle que Hugo Micheron, brillant chercheur n'est pas "un polémiste"

Me Reinhart au nom de 13onze15 après des débats au sein de l'association se rallie à Life for Paris pour écouter François Hollande.

"Mais je constate qu'il va y avoir 162 132 questions pour M. Hollande, on pourra entendre M. Kepel aujourd'hui ?"

Me Reinhart cite aussi à la barre le nom d'un ses confrères du barreau d'Aix, mort il y deux jours, alors qu'il allait s'apprêter à plaider avec sa robe. Cet avocat s'appelait Me Arnaud Bouriant. "C'était juste pour citer son nom, même si ça fait commémoration".

L'audience est suspendue le temps de délibérer sur ces contestations.

La sonnerie retentit. La cour revient. L'audience est reprise.

Président : "Bien, après en avoir délibéré, la cour rejette les demandes d'opposition à ces témoins Hollande, Micheron, Rougier, Kepel, Sifaoui"

Et le président demande à l'huissier de "faire entrer le témoin".

Et François Hollande s'approche de la barre. Pas décontracté. Costume gris. Le président de la cour : "Bonjour, Monsieur le président" François Hollande : "Bonjour, Monsieur le président" Et la salle rit.

François Hollande se tient droit à la barre, costume gris, cravate bleue, chemise blanche, lunettes. Petit sourire dans les yeux. "Mon nom est Hollande, mon prénom est François".

Puis la voix se fait plus grave, il se met à lire ses notes. Ton plus solennel, ton de président. "Je sais la souffrance que les victimes ont exprimé devant la cour, je répondrai à toutes les questions"

François Hollande : "J'entends notamment justifier l'engagement de la France contre le terrorisme islamique. Ce groupe nous a frappé non pas pour ce que nous faisions mais pour ce que nous représentions"

François Hollande estime que la France a été frappée "non pour nos actions à l’étranger, mais pour nos modes de vie ici même"

François Hollande veut savoir "comment des êtres humains ont pu dériver, basculer"

François Hollande : "Dans une démocratie, pour punir les responsables ou les complices d'une attaque monstrueuse, la réponse est celle du droit et non celle de la vengeance".

François Hollande : "La démocratie sera toujours plus forte que la barbarie. C’est toujours elle qui l’emporte à la fin".

Et François Hollande qui en a terminé avec sa déclaration, commence à répondre aux questions du président de la cour

Le président lui demande de raconter sa soirée du 13 Novembre. François Hollande dit qu'il n'avait pas prévu de se rendre au Stade de France, se décide quand la chancelière y va. "Un soir clément, une rencontre amicale"

Puis la première explosion l'inquiète, "j'ai pris conscience que nous pouvions être face à un attentat, à la deuxième explosion, je n'ai plus eu de doutes"

Puis François Hollande veut à tout prix sécuriser le Stade de France, tout faire pour que les terroristes n'entrent pas à l'intérieur, puis il est informé de fusillades sur les terrasses, puis d'une attaque au Bataclan

François Hollande : "Je prends une décision de convoquer le conseil des ministres pour déclarer l'état d'urgence, je prends une 2e décision de fermer les frontières pour éviter que des terroristes puissent s'échapper, une 3e décision de faire libérer les otages"

François Hollande : "Ensuite, je me pose la question si je me rends sur les lieux du Bataclan. Je décide d'aller jusqu'à l'entrée. Je vois des personnes qui sortent, ils me voient. Agrippés les uns aux autres. Je garde ces images gravées dans ma mémoire."

Le président l'interroge sur l'état de la menace terroriste. François Hollande : "Chaque jour nous étions sous la menace. Nous savions que dans le flux des réfugiés, il y avait des individus qui étaient là pour tromper la vigilance"

François Hollande : "Mais nous ne savions pas où ni comment ils allaient nous frapper"

Le président demande s'il y avait une menace particulière sur le Bataclan ? François Hollande évoque la première menace de 2009. François Hollande revient sur l'assaut mené par la BRI au Bataclan. "La BRI a été exemplaire, avec un courage exceptionnel. La BAC aussi. Mon plus grand respect. Et ce qui compte, c’est que tous les otages ont été libérés"

Me Delas, avocat de Life for Paris interroge François Hollande sur les revendications des terroristes du Bataclan, l'avocat précise qu'on a entendu dans ce prétoire ces revendications et le nom de Hollande prononcé par les terroristes. A-t-il entendu cette bande ?

François Hollande répond qu'il a entendu cette bande récemment. Et il dit que dans la revendication écrire, "les mots utilisés, c'est sur notre mode de vie. Cela m'a conduit sur ma propre responsabilité. Je dis ici devant la cour, je ferais exactement la même chose"

Même si ce n'est pas le lieu pour le proclamer, François Hollande qu'il choisirait la même politique étrangère. Et il tient à le dire devant les parties civiles. Et il rappelle aussi que les premières victimes du terrorisme islamiste sont des musulmans"

François Hollande donne les dates des premiers bombardements de la coalition en Syrie : septembre 2015

François Hollande : "Il était hors de question pour nous en Syrie de favoriser le régime d'Assad, auteur d'exactions / armes chimiques"

François Hollande : "Nous étions certains à partir du début de 2015 que Daech voulait nous faire la guerre. On nous a fait la guerre, nous avons répondu"

Me Delas a une question sur Abaaoud. François Hollande : "A ma connaissance, je n'ai eu le nom d'Abaaoud qu'en août 2015, comme organisateur des attentats. Vous me direz, est-ce que vous avez su qu'il était en Europe ? Non."

Me Delas demande s'il a échangé avec des survivants le soir du 13 Novembre ?

François Hollande : "Je pense que beaucoup de victimes qui sortaient du Bataclan ne pouvaient même pas imaginer ce qu'il s'était passé ailleurs. Stupeur partagée. Mais il n'y a eu aucun échange" de mots ce 13 Novembre. Il a revu des survivants après.

François Hollande rappelle à la barre que sous son quinquennat, plusieurs attentats. Et qu'il a créé un secrétariat d'Etat aux victimes.

Me Delas : "Chacun sait que votre prédécesseur, le président de la crise financière, votre successeur de la crise pandémique, et vous le président des attentats"... François Hollande : "Je n'avais pas prévu ces lois antiterroristes, c'était pas dans mon programme"

François Hollande : "Quand on me demande mon plus grand souvenir du quinquennat, quand 4 millions de personnes ont défilé après l'attentat contre Charlie Hebdo_

Vous avez remarqué, pas de défilé après le 13 Novembre. Il fallait qu'on se tienne debout"

Me Maktouf demande si "la menace a été prise suffisamment au sérieux pour éviter ces attentats ?"

François Hollande : "Je mesure la souffrance des victimes. En âme et conscience, j'ai toujours eu toutes les informations sur la gravité de la menace, sur son ampleur, sur la détermination des groupes qui nous faisaient la guerre".

François Hollande :"Nous avons fait tout ce que nous pouvions, les frapper même en Syrie. Mais la veille ou l'avant-veille du 13 Novembre, les individus nous les connaissions mais nous ne savions pas qu'ils allaient agir"

Un autre avocat de parties civiles reprend une question autour de la fuite de Salah Abdeslam, une assesseure avait aussi eu une question similaire. Plusieurs fois à la barre, François Hollande reporte une faute sur un autre Etat, en l'occurrence la Belgique.

Salah Abdeslam, au 42e jour de ce procès n'est plus à sa place habituelle, dans le box de verre des accusés. A cette place, François Hollande aurait été directement devant lui. Là, Abdeslam à moitié caché, on le voit même mal. Mais est-ce fait exprès ?

Il est arrivé que d'autres accusés changent ponctuellement de place. Mais jamais encore Abdeslam.

François Hollande est interrogé plusieurs fois par un avocat de parties civiles qui veut savoir si le 4 septembre en conseil de défense, a été tranché qu'on renonçait à des cibles djihadistes comme Abaaoud pour éviter des victimes civiles.

François Hollande : "Vous imaginez ce que c'est de faire une frappe sur un immeuble"

François Hollande se tourne plusieurs fois vers cet avocat qui revient avec ses questions. Le président de la cour : "attendez, maître, vous n'écoutez pas les réponses !" Et le magistrat demande au président Hollande de se tourner face à la cour.

Le magistrat souligne qu'il faut répondre face à la cour, devant une cour d'assises, "et puis c'est filmé, et j'ai cru comprendre que vous avez beaucoup de candidats... pour votre audition" Sourires.

Un avocat de parties civiles demande si les terroristes ont pu frapper le Stade de France en changeant leurs plans sachant que François Hollande s'y rendait finalement ?

François Hollande : "Les terroristes n'ont pas un service de renseignement" très élaboré. Et l'ex-président de rappeler que ce 13 Novembre, il décide d'aller au Stade de France au dernier moment, sa réunion s'étant terminée plus tôt que prévu.

François Hollande : "Je peux vous donner une leçon d'expérience. Le terrorisme islamiste, c’est un mélange de détermination, de préparation et d’improvisation"

Me Morice revient sur les menaces qui pesaient sur le Bataclan en 2009. Un père de victime du 13 Novembre a dit : "Mon fils n'y serait pas allé s'il connaissait cette menace" François Hollande : "J'ai moi-même fait un meeting au Bataclan"

Me Morice demande pourquoi pas plus de lieux fermés ou protégés si menaces existantes ? François Hollande : "C'eût été céder au terrorisme. Est-ce qu'il aurait fallu fermer toutes les salles ? C'est cela qu'on attendait du président de la France ?"

François Hollande : "Sachez bien que je respecte profondément les parents des victimes, penser qu'un de leurs enfants a pu mourir dans une salle de concert, mais nous n'avions pas de menace particulière sur le Bataclan" en 2015

Et Me Morice veut insister. Le président de la cour le coupe. Me Morice s'énerve : "Elle vous gêne ma question ?" J-L Périès : "Non, mais quand vous la posez avec insistance, et que vous avez des réponses, on peut avancer." Et le ton monte un peu.

François Hollande écoute.

Me Szwarc arrive avec une question sur l'état d'urgence. Président Périès : "Bon, on s'éloigne"... "enfin, répondez ce que vous voulez, monsieur le président" Et le président Hollande dit qu'il va répondre.

A la barre, François Hollande fait plusieurs fois rire. A une question d'un avocat de parties civiles sur Bernard Squarcini, ex-patron de l'ex-DCRI, une question que le président Périès juge déjà évoquée, mais François Hollande répond : "Monsieur Squarcini existe !" Rires.

Et après une courte suspension, l'audience reprend avec les questions de l'avocate générale Camille Hennetier à François Hollande.

Camille Hennetier demande si une notion précise entre la cellule de Raqqa et la Belgique ?

François Hollande parle d'Abaaoud.

Camille Hennetier : "l'état de la coopération ?" François Hollande : "Les informations circulaient autant que possible"

Camille Hennetier : "Est-ce que vous aviez entendu parler de Oussama Atar comme le commanditaire présumé ?" François Hollande : "Personnellement non"

Nicolas Braconnay, autre avocat général a une question sur la "guerre" faite par ce groupe, mot que le président Hollande avait employé après le 13 Novembre A la barre, François Hollande : "Nous n'étions pas en face d'individus isolés".

Me Olivia Ronen : "Monsieur François Hollande, bonsoir, je suis l'avocate de Salah Abdeslam. Est-ce que vous avez en tête ou sur vos fiches la date des premières frappes françaises ?" en Syrie

Olivia Ronen note la date du 19 septembre 2015. François Hollande a cité le 27 septembre 2015. Décision prise le 7 septembre 2015, a-t-il dit et elle parle d'une déclaration d'Al Adnani porte-parole de Daech le 21 septembre. Avant/après les frappes ?

François Hollande lui parle d'une cellule constituée bien avant, dès 2014 pour préparer des attentats, et il cite l'attentat par Nemmouche à Bruxelles, mai 2014.

Et Olivia Ronen répète avec assurance à François Hollande que la déclaration de Al Adnani porte-parole de EI en septembre 2015, postérieures aux frappes et non antérieures. Elle souligne qu'il a dit l'inverse à la barre.

Et avec aplomb, "avec tout le respect que je vous dois", la jeune avocate de Salah Abdeslam demande et demande encore à François Hollande s'il y a eu "des victimes collatérales" dans les frappes ?

François Hollande : "Je n'ai pas eu connaissance de victimes collatérales", répond-il. Et elle veut lui faire dire le contraire. François Hollande : "Je n'en ai pas été informé"

Olivia Ronen : "Je le redis, les questions que je vous pose ne cherchent pas à légitimer les attentats"

Echanges presque vifs entre François Hollande et Olivia Ronen. L'avocate de Salah Abdeslam qui dit sur une de ses réponses "c'est mon plaisir", "je ne sais pas si le mot est bien choisi" rétorque l'ex chef d'Etat

Me Ronen aurait souhaité "des réponses précises, claires, assumées" et se rassied. Précision : Salah Abdeslam semble caché par une sorte d'effet d'optique vu d'un écran de retransmission, mais bien assis derrière ses avocats. A changé de place, mais peu.

Me Ilyacine Maallaoui, avocat de l'accusé Ayari renchérit et estime que reconnaître des victimes collatérales de frappes françaises ne serait pas "une offense" aux victimes du

Me Ilyacine Maallaoui a une dernière question sur la guerre. François Hollande, ton humoristique : "Monsieur le président, je ne sais pas si ce procès nous permet de réviser la charte des Nations-Unies" Président Périès : "On s'éloigne là, on s'éloigne..."

Un avocat de la défense demande s'il a été interpellé par les terroristes du Bataclan ayant grandi en France ? François Hollande : "Interpellé, oui..."Mais "c'est la faute de la République, de l'école ? Je ne veux pas entrer dans cette logique où ce serait à nous d'expliquer.

Me Isa Gultalsar, autre avocat de l'accusé Ayari demande au président si les choix géopolitiques, et il cite un renouvellement, une répétition, guerre contre les Taliban, retour des Taliban, ces choix, cette répétition "aboutiront dans 20 ans à un autre procès" ?

François Hollande : "Nous avons éradiqué Daech "

Me Eskenazi, avocat de Abrini arrive avec une question : "Je précise que vient du barreau de Bruxelles, comme ça vous comprendrez d'où viennent mes questions" dit-il au président Hollande. Le président Périès ajoute : "A l'accent on l'avait compris..."

Et Me Eskenazi pose sa question sur la France et la Syrie. François Hollande : "En fait, je comprends, les avocats de la défense sont dans la politique internationale, pas dans la politique pénale ! Mais je vais vous répondre"

François Hollande : "Nous sommes dans un procès où les accusés ont des avocats, où le président répond pendant une après-midi à toutes les questions, est-ce qu’on est pas dans une démocratie ? C’est une des raisons qui fait que je suis venu à ce procès".

Me Nogueras, avocat de Abrini cite le juge Trévidic qui avait dit à propos des attentats avant le 13 Novembre : "La question n'est si mais quand ?"Si tout a été fait pour pas que cela n’arrive et si cela est arrivé, qu’est-ce qui selon vous n’a pas fonctionné ?"

Me Nogueras : "Est-ce que le terrorisme est une chose inévitable ?" François Hollande : "Ce groupe Daech n'est plus capable de cette attaque pour le moment, mais la guerre n'est pas finie. Quand les conflits perdurent, les groupes terroristes s'installent"

François Hollande redit "la démocratie est plus forte que la barbarie, nous sommes fiers d'avoir démantelé un groupe terroriste" comme Daech.

Le président Périès remercie le président Hollande. Salah Abdeslam se lève dans son box. Président de la cour : "Non, Monsieur Abdeslam, si vous avez des questions, vous passez par vos conseils". Et Abdeslam se rassied. Et le président Hollande quitte la barre.

Fin de l'audience, jour 42.